Les observateurs de l'OSCE ont affirmé lundi avoir constaté des «violations» dont du «bourrage d'urnes» lors des législatives en Russie qui ont accordé la veille la majorité absolue à la chambre basse du Parlement au parti de Vladimir Poutine, même s'il est en net recul.

«Le vote était bien organisé mais la qualité du processus s'est considérablement détériorée durant le décompte des voix, qui a été caractérisé par des violations fréquentes de la procédure, notamment avec de sérieuses indications de bourrage des urnes», a relevé la mission d'observation de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE).

Comme en 2007, elle a aussi constaté que «la concurrence politique (avait été) limitée et pas équitable» durant la campagne et a souligné «le manque d'indépendance» des autorités électorales, des médias et la trop grande proximité de l'État et de Russie unie.

La France a demandé lundi que «toute la lumière soit faite» sur ces violations et le gouvernement allemand s'est dit «très inquiet» après la publication des conclusions de l'OSCE.

Le Parti communiste, deuxième du scrutin avec un peu moins de 20% des suffrages, a indiqué préparer «une plainte à la Cour suprême de Russie» et plusieurs autres auprès de tribunaux régionaux après avoir constaté des infractions dans 1600 bureaux de vote.

Le président russe, Dmitri Medvedev a rejeté ces critiques, jugeant que le vote avait été démocratique.

«Les élections ont été honnêtes, équitables et démocratiques», a-t-il déclaré, selon Interfax.

Russie unie a fait son plus mauvais score (29 %) dans la région de Iaroslavl (300 km au nord de Moscou). Le parti a cependant battu son record de popularité en Tchétchénie, république instable du Caucase russe, avec un tonitruant 99,48%, contre 99,36% en 2007.

À l'échelle nationale, le parti au pouvoir remporte 49,54% des voix, un niveau toujours très élevé mais qui représente une baisse d'environ 15 points par rapport à 2007 (64,3%).

Néanmoins, en vertu d'un système complexe de répartition des sièges lié au mode de scrutin, 238 mandats sur 450 reviennent à Russie unie, soit 12 sièges de plus que la majorité absolue.

Il n'aura donc besoin d'aucun soutien pour former le gouvernement, même s'il perd 77 députés et sa majorité des deux tiers.

Le Parti communiste aura 92 députés, Russie juste (centre-gauche) 64 et le parti libéral-démocrate (nationaliste) 56 sièges.

La presse russe notait lundi que ce score est peu reluisant pour le mouvement de Vladimir Poutine, estimant que l'appareil administratif avait été mis au service du régime, avait organisé des fraudes en sa faveur et était à l'origine de pressions contre des ONG et médias indépendants.

«Si la société avait besoin d'une confirmation que les élections sont «bricolées», la confirmation est là: la nervosité et la réaction hystérique des autorités face aux tentatives légales et pacifiques de contrôler le déroulement du scrutin», notait lundi le journal Vedomosti.

Le quotidien relève en particulier les cyber-attaques qui ont paralysé les sites de l'ONG Golos, spécialisée dans la surveillance des scrutins et par ailleurs dans le collimateur de la justice, et de médias indépendants comme le journal Kommersant ou la radio Écho de Moscou.

Plusieurs d'entre eux (kommersant.ru, golos.ru et slon.ru notamment) ne fonctionnaient d'ailleurs toujours pas lundi après-midi.

«Nombreux sont ceux qui refuseront de reconnaître les résultats de telles «élections»», observe encore Vedomosti.

Pour l'analyste Alexandre Goltz, sur le site ej.ru, les électeurs russes ont été «violés» lors de «cette imitation d'expression de la volonté populaire».

Selon lui, Vladimir Poutine, candidat à la présidentielle de mars 2012, Dmitri Medvedev lui cédant la place, a prouvé une fois de plus que c'est lui qui décidait de tout.

«Le but était de convaincre le pays qu'aujourd'hui, demain, après-demain, Poutine fera ce qu'il veut», note M. Goltz.

L'actuel premier ministre et homme fort du pays a d'ailleurs relevé dans la nuit de dimanche que les résultats des législatives vont permettre «le développement stable du pays».

Le retour de M. Poutine au Kremlin ne fait guère de doute et il devrait être élu en mars pour un troisième mandat, après ceux accomplis entre 2000 et 2008. Il avait alors cédé la place à Dmitri Medvedev faute de pouvoir enchaîner plus de deux mandats consécutifs.