Le chef du gouvernement Silvio Berlusconi luttait lundi pour sa survie politique, démentant toute velléité de démission alors que l'étau des marchés se resserrait sur l'Italie, mise sous surveillance par le FMI et Bruxelles, et blâmée pour son manque de crédibilité.

«Je ne comprends pas comment ont pu circuler les rumeurs sur ma démission, elles sont dénuées de fondement. Je veux regarder droit dans les yeux ceux qui essayent de me trahir», a déclaré le Cavaliere au quotidien de droite Libero.

La pression se fait plus forte sur Silvio Berlusconi qui, sur le papier, n'aurait plus la majorité absolue de 316 députés à la Chambre.

Mais dans la soirée, le président du Conseil a multiplié les messages -sur Facebook ou dans des communiqués officiels- pour se déclarer une nouvelle fois «convaincu» d'avoir la majorité «pour faire les réformes que l'Europe nous demande et qui servent à relancer l'économie».

Il a aussi rejeté tout gouvernement d'unité nationale incluant la gauche.

Aux prises avec la défection de trois députés de son parti, le PDL, qui ont rallié l'opposition centriste, il fait face en outre à l'émergence d'un groupe d'une vingtaine de «mécontents» au sein de sa formation dont le vote ne serait plus garanti.

Le premier vote test pour le chef du gouvernement aura lieu mardi et portera sur l'approbation par la Chambre du bilan 2010 de l'État italien avant un vote de confiance dans les prochains jours sur les mesures contre la crise promises fin octobre à l'Union européenne.

Ces rumeurs de démission ont été déclenchées par des déclarations d'un de ses proches, Giuliano Ferrara, et alimentées par des informations sur une rencontre entre le Cavaliere, ses enfants et le patron de son empire médiatique Mediaset, à Arcore, près de Milan, pour parler d'une éventuelle démission.

«Que Berlusconi soit sur le point de céder la place, c'est désormais une chose claire, c'est une question d'heures, voire de minutes», a affirmé M. Ferrara, directeur du journal de droite Il Foglio, avant de revenir sur ses propos en soulignant qu'il le lui conseillait comme «seule voie de sortie possible».

La réaction des marchés a été immédiate. Alors qu'elle avait lâché plus de 2% en début de séance, la Bourse de Milan a brusquement inversé la tendance et a bondi de près de 3% à la mi-journée en raison de ces rumeurs.

Après le démenti, sa progression a ralenti, mais elle a tout de même terminé la séance sur une hausse de 1,32% alors que Paris et Francfort ont fini dans le rouge, les investisseurs pariant sur une fin prochaine du gouvernement Berlusconi, seule solution, selon eux, pour rétablir la crédibilité de l'Italie.

Malgré l'adoption cet été de mesures d'austérité draconiennes, censées permettre au pays d'atteindre l'équilibre budgétaire en 2013 et de réduire sa dette colossale de 1900 milliards d'euros (120% du PIB), et les promesses de réformes pour relancer la croissance, les marchés ne croient plus à la capacité de Silvio Berlusconi de faire face à la crise.

«Le gouvernement est au point mort et de moins en moins crédible», souligne Tommaso Federici, responsable de la gestion à la banque Banca Ifigest.

Sur le marché obligataire, les investisseurs continuaient donc à faire pression sur la dette italienne et les taux italiens à dix ans, qui ont franchi un nouveau record historique lundi, s'inscrivant toujours au-dessus de 6,6% vers 17 h GMT.

Et «les 7% seront atteints d'ici peu», pronostique Cyril Regnat, de la banque Natixis, un niveau auquel l'Italie ne serait «pas capable» de faire face «de longs mois durant».

Face à la gravité de la situation, le commissaire européen aux Affaires économiques, Olli Rehn, a jugé «essentiel que l'Italie respecte ses engagements budgétaires et intensifie les réformes structurelles», avant une réunion des ministres des Finances de la zone euro à Bruxelles.

Le ministre allemand des Finances Wolfgang Schäuble a jugé en revanche injustifiée la nervosité actuelle des marchés à l'égard de l'Italie qui n'est «pas dans une situation comparable» à celle de la Grèce.

Après la mise sous surveillance de la péninsule par le FMI, au G20 de Cannes, et par l'UE, Bruxelles a en outre confirmé que sa mission arriverait à Rome «cette semaine», ajoutant qu'un «questionnaire» avait déjà été envoyé au gouvernement pour lui demander de «clarifier» le calendrier et l'impact budgétaire de ses réformes.

Adressant un message se voulant rassurant, le fidèle bras droit de M. Berlusconi, Gianni Letta, a promis que les engagements de l'Italie seraient tenus «quels que soient les événements».