Malgré la tombée de la nuit et le froid, les secouristes travaillaient d'arrache-pied lundi à la recherche de survivants du fort séisme qui a frappé la veille la province orientale turque de Van, y faisant 279 morts, selon un dernier bilan provisoire.

La catastrophe a également fait 1 300 blessés, a précisé le vice-Premier ministre Bülent Arinç au sortir d'un conseil des ministres à Ankara.

La terre s'est mise à trembler en début d'après-midi (6h42, heure de Montréal) dans la région de Van, ville de 370 000 habitants, près de la frontière iranienne. Puissant, le séisme a été ressenti dans un rayon de 250 km, jusqu'à Erevan, capitale de l'Arménie voisine.

Selon les médias turcs, plus 370 bâtiments, dont certains de huit étages, se sont effondrés dans la ville de Van, située à 16 km de l'épicentre. Les recherches se poursuivront au cours des prochains jours pour tenter de retrouver des survivants dans les décombres des nombreux immeubles effondrés.

«C'est un puissant séisme (...) Entre 500 et 1000 personnes pourraient avoir perdu la vie, mais il s'agit d'une estimation», a évalué devant la presse Mustafa Erdik, chef de l'Institut sismologique de Kandilli, à Istanbul.

Construction déficiente

«Le bilan final pourrait facilement dépasser le millier de morts à mesure que les recherches vont progresser», a estimé pour sa part Murat Saatcioglu, professeur d'ingénierie de l'Université d'Ottawa, Turc d'origine. En plus de la puissance du séisme, le laxisme longtemps observé dans la construction des bâtiments pourrait avoir contribué à accentuer les dommages.

«La Turquie a un excellent code du bâtiment, mais il n'a pas été respecté pendant longtemps», poursuit Murat Saatcioglu. Le tout a changé au lendemain du désastreux séisme d'Izmit, survenu en août 1999, qui a fait plus de 17 000 morts, 50 000 blessés et 50 0000 sans-abri. Trois mois plus tard, près de 1000 autres personnes avaient péri dans un autre séisme de magnitude 7,2.

Les autorités auront également fort à faire pour porter secours aux nombreux villages isolés de cette région montagneuse. Or, plusieurs personnes risquent d'y avoir péri, les habitants de cette région pauvre vivant souvent dans des maisons de terre s'effondrant facilement en cas de séisme.

Dans les heures ayant suivi le séisme, près de 200 répliques ont été ressenties dans l'est de la Turquie. Le Centre iranien de sismologie, basé à Téhéran, a enregistré plus de 41 répliques d'une magnitude supérieure à 4,0. L'une des répliques a même atteint une magnitude de 6,0.

«Les gens vont sûrement préférer dormir dehors pour les prochaines semaines, parce qu'il y a eu beaucoup de répliques. Ça se passe tout le temps comme ça», s'est attristée Aytul Boko, une Turque d'origine vivant à Montréal. Originaire du nord-est de la Turquie, la femme mesurait bien l'ampleur du drame, ayant elle-même perdu plusieurs membres de sa famille dans un séisme voilà quelques années.

Communications difficiles

De nombreux membres de la communauté turque de Montréal ont passé la journée à attendre des nouvelles de leurs proches. Les communications étaient toutefois difficiles, les lignes téléphoniques ayant été coupées dans la région sinistrée, tout comme l'électricité. «C'est un événement très triste. Les gens de cette région souffrent beaucoup», a commenté Fehmi Kala, qui dirige le Festival turc de Montréal.

La Turquie est fréquemment frappée par des séismes, deux importantes failles traversant le pays. Le séisme de dimanche résulte de la collision entre les plaques arabique et eurasienne, qui convergent de 23 mm par année. En 1976, un séisme de magnitude 7,3 avait frappé à 70 km de Van, tuant plus de 5000 personnes. «C'est une région très active, dit le professeur Murat Saatcioglu. Malheureusement, ce n'est pas surprenant.»

- Avec AP et  AFP

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Principaux séismes en Turquie

> 17 août 1999, 17 000 morts (magnitude 7,6)

> 30 octobre 1980, 1300 morts (6,9)

> 6 septembre 1975, 2000 morts (6,7)

> 24 novembre 1976, 5000 morts (7,3)

> 26 décembre 1939, 32 700 morts (7,8)