Européens et Américains ont lancé mardi un appel au calme dans le nord du Kosovo, après la décision de Pristina de déployer sa police pour prendre le contrôle de deux postes frontaliers avec la Serbie, tandis que la Kfor de l'OTAN renforçait sa présence.

Cette initiative de Pristina a entraîné un vif regain de tension dans cette région du nord, peuplée majoritairement de Serbes qui refusent de reconnaître les autorités kosovares et ne veulent dépendre que de Belgrade.

Elle risque aussi de mettre en péril le dialogue tout juste engagé entre Belgrade et Pristina sous les auspices de l'Union européenne (UE).

Une porte-parole de la chef de la diplomatie européenne Catherine Ashton, Maja Kocijancik, a déploré la mesure kosovare, soulignant que ce déploiement policier n'avait pas été fait en consultation avec l'UE ou avec la communauté internationale.

«Nous pensons que c'est le dialogue qui est la bonne voie à suivre pour résoudre la question du commerce» entre la Serbie et le Kosovo, a-t-elle ajouté.

Mme Ashton s'est entretenue avec le président serbe Boris Tadic et avec le Premier ministre kosovar Hashim Thaci, et les a priés de «faire tout ce qui est nécessaire pour calmer les tensions», a indiqué aussi la porte-parole.

Une porte-parole du département d'État américain, Heide Bronke Fulton, a également appelé les deux parties à «oeuvrer d'urgence à une désescalade de la situation actuelle», exprimant ses «regrets» pour l'action entreprise par le Kosovo.

Les autorités de Pristina ont expliqué leur déploiement policier par le fait qu'elles voulaient imposer dans le nord du Kosovo l'embargo qu'elles ont institué le 20 juillet sur les importations de produits serbes au Kosovo.

Cet embargo kosovar a été décidé en rétorsion à l'embargo des produits kosovars en Serbie, qui est en vigueur depuis l'indépendance du Kosovo déclarée unilatéralement en 2008.

La Serbie, qui considère toujours le Kosovo comme sa province méridionale, refuse toute importation de produits kosovars accompagnée d'indications faisant état d'un Kosovo indépendant, comme des tampons douaniers, un symbole étatique.

Pour sa part, la Mission de l'OTAN au Kosovo (Kfor) «a pris immédiatement des mesures dans le nord du Kosovo afin de faire baisser la tension dans le secteur», a déclaré une porte-parole de l'Alliance, Carmen Romero, à la presse.

«Le commandement de la Kfor a engagé le dialogue avec les principaux protagonistes» et ce «en coordination étroite avec Eulex», la Mission de police et de justice déployée au Kosovo par l'UE, «pour maintenir la sécurité», a-t-elle poursuivi.

C'est la première fois depuis la proclamation d'indépendance en 2008 que Pristina tente d'imposer sa souveraineté dans le nord du Kosovo, dont le contrôle lui échappe.

«Nous exercerons la pleine souveraineté dans cette partie du pays», a déclaré le vice-Premier ministre kosovar, Hajredin Kuci, en précisant que l'opération avait été «ordonnée» par Hashim Thaci.

Dans une conférence de presse mardi soir, ce dernier a assuré que son gouvernement n'avait pour «seul objectif» que d'«établir la loi et l'ordre sur l'ensemble» du territoire kosovar.

«Nous ne pouvons rester éternellement indifférents devant le fait qu'une partie de notre territoire demeure un trou noir. Nous ne pouvons permettre indéfiniment que notre souveraineté soit menacée», a-t-il ajouté.

S'exprimant depuis Prague et cité par l'agence Beta, Boris Tadic a estimé que l'initiative kosvoare constituait une «menace au processus de paix», les pourparlers entre Belgrade et Pristina.

«La Serbie ne fera pas la guerre, mais nous prévenons que l'utilisation de la violence revêt des risques considérables», a-t-il ajouté.

Par ailleurs, un policier kosovar grièvement blessé lors de heurts avec des manifestants serbes qui protestaient contre l'opération des autorités de Pristina, est mort mardi soir des suites de ses blessures, a annoncé le porte-parole de la police, Arber Beka.