Les aspirants à la présidence se mettent en position en France à l'approche d'un scrutin crucial qui promet de donner du fil à retordre à Nicolas Sarkozy. La cote de popularité du chef d'État demeure très basse à neuf mois du premier tour, mais ses partisans croient voir le vent tourner, relate notre journaliste.

Le président français Nicolas Sarkozy, qui a vu sa cote de popularité chuter de manière quasi constante depuis son arrivée au pouvoir en 2007, peut-il remporter un second mandat lors du scrutin prévu l'année prochaine?

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Seuls les plus optimistes de ses partisans s'avisaient de répondre positivement sans hésiter à la question il y a quelques mois. Mais les démêlés judiciaires de l'ex-directeur général du Fonds monétaire international, Dominique Strauss-Kahn, qui semblait bien placer pour mener la gauche à une confortable victoire en 2012, ont changé la donne.

Son absence de la primaire socialiste, qui s'annonce désormais comme un duel entre Martine Aubry et François Hollande, ouvre de nouvelles perspectives pour le président sortant. À tel point que Le Figaro n'hésite pas à titrer que le «jeu s'équilibre entre Sarkozy et les socialistes».

L'analyse du quotidien, qui colle souvent étroitement à celle de l'Élysée en matière politique, s'inspire d'un nouveau sondage de la firme CSA suggérant une remontée marquée du chef d'État dans les intentions de vote.

Le sondage indique qu'il remporterait 27% des voix au premier tour contre 25% pour Martine Aubry. Advenant le cas où François Hollande serait gagnant de la primaire, qui se conclura en octobre, les deux principaux candidats se retrouveraient à égalité à 26%.

Dans un cas comme dans l'autre, le Front national de Marine Le Pen arriverait troisième avec 18% des voix, un résultat qui semble repousser la perspective d'une répétition du scénario-choc du 21 avril 2002. La formation d'extrême droite avait alors réussi à passer au second tour de l'élection présidentielle.

Le résultat obtenu par CSA est difficilement conciliable avec un autre récent sondage d'Ipsos qui place les deux principaux candidats socialistes loin devant Nicolas Sarkozy au premier tour, avec 29% des voix contre 22%.

Le chargé des communications de l'Élysée, Franck Louvrier, se montre pour l'heure prudent, assurant que les conseillers du président «ne sont pas plus euphoriques quand les sondages montent que déprimés quand ils descendent».

La prudence s'impose à en croire Denis Muzet, sociologue des médias. «Le Figaro fait de l'intox. Ils essaient d'accompagner un frémissement infinitésimal des sondages par un discours qui vise à renforcer le mouvement... À mon avis, l'électroencéphalogramme est plat», souligne-t-il.

L'analyste pense que le chef d'État aura fort à faire pour tenter de recréer un lien profond avec le public français. Et ce n'est pas l'approche de «représidentalisation» soutenue par ses conseillers, en vertu de laquelle il se montre plus discret sur le plan médiatique, tentant de prendre de la «hauteur», qui va changer les choses.

«La représidentialisation est essentiellement cosmétique. Il joue au président normal, au président qui délègue, mais ça ne correspond pas à sa nature profonde» souligne en entrevue M. Muzet.

L'entourage du président aimerait bien obtenir, pour renforcer sa position au premier tour, que l'ex-ministre Jean-Louis Borloo s'abstienne de participer au scrutin. Le politicien, qui a claqué la porte du gouvernement à l'automne après s'être vu refuser le poste de premier ministre, a pris la tête d'un regroupement de partis centristes qui pèse près de 10% dans les sondages.

La droite a aussi commencé à tirer sur les favoris socialistes, en particulier François Hollande, qui aspire à incarner un président «normal».

M. Muzet pense que la majorité se trompe en cherchant à tourner en ridicule ses prétentions à ce sujet. «Les Français en ont marre des politiciens anormaux... Ils aspirent à un profil de dirigeant social-démocrate modéré, simple, sérieux, appliqué qui n'est pas forcément génial, mais qui est efficace», dit-il.

La récente désignation, côté écologiste, de l'ex-juge d'instruction Éva Joly face au très médiatique Nicolas Hulot témoigne de cette aspiration populaire.

Martine Aubry cadre bien aussi avec ce besoin de simplicité et d'intégrité, pense l'analyste, qui juge cependant problématique sa «posture» de candidate «anti-com» et «anti-médias».

«En se définissant contre quelque chose, elle risque de ne pas créer de désir, de se retrouver isolée», pense le spécialiste, qui se garde de faire de pronostics définitifs sur les chances de victoire des uns et des autres tant à la primaire socialiste qu'au scrutin présidentiel.

«L'élection présidentielle, c'est une dynamique, c'est une dialectique différente. Bien des surprises peuvent survenir», conclut-il.

CHIFFRES

9: Mois avant le premier tour de l'élection présidentielle

6: Candidats pour la primaire socialiste

69: Pourcentage de Français qui avaient une bonne opinion de Nicolas Sarkozy en août 2007, quelques mois après son élection

34: Pourcentage de Français qui ont une bonne opinion de Nicolas Sarkozy selon un récent sondage