Sa silhouette dégingandée revient, depuis six ans, dans tout ce que l'Angleterre compte de médias. Le détective privé Glenn Mulcaire est l'homme qui a écouté les répondeurs de plus de 4330 personnes: membres de la famille royale, étoiles du foot ou du cinéma... ses écoutes n'ont épargné aucune personnalité publique. Pas même les victimes d'attentats ou de faits divers.

La révélation, cette semaine, du piratage du répondeur de Milly Dowler, adolescente disparue en 2002, aura été le scandale de trop pour le détective et pour News of the World. Dans les jours qui ont suivi la disparition de Milly, Mulcaire a effacé des messages du répondeur, entretenant l'espoir des proches de la jeune fille et brouillant l'enquête. «Travailler pour News of the World n'a jamais été facile. J'étais conscient de repousser les limites de l'éthique, mais je n'ai jamais compris qu'on violait la loi», s'est-il défendu lundi.

Le prince William

Le tabloïd, un des fleurons de l'empire Murdoch, a pris contact avec Mulcaire en 2005, pour vérifier une information sur la famille royale. Rien d'inhabituel, selon le détective, qui recevait 10 ou 20 commandes de ce genre chaque année. C'est ainsi que le prince William est devenu l'une des premières cibles de News of the World, qui a pu révéler de nombreuses informations de première main sur le fils aîné de Charles. Le journaliste du tabloïd chargé de la famille royale, Clive Goodman, ne réfrénait pas son appétit pour ces informations exclusives, malgré les craintes de Mulcaire d'être repéré.

«On m'a clairement dit que, si j'arrêtais, je ne travaillerais plus jamais dans les médias», a-t-il déclaré. Tous les deux ont été condamnés à plusieurs mois de prison fermes en 2007. Devant le scandale, News of the World répète que la pratique est circonscrite à Glenn Mulcaire et Andy Goodman - une ligne de défense qui n'a pas résisté aux résultats d'une enquête policière et aux révélations publiées en série dans la presse britannique.

Depuis que le nom de Milly Dowler s'est ajouté à la liste de ses victimes, Mulcaire et sa famille sont la cible des journalistes. Celui qui s'est aussi illustré dans le soccer semi-professionnel au début des années 2000 demande ironiquement aux médias de respecter la vie privée de ses cinq enfants. «Je trouve une certaine consolation en pensant qu'il peut maintenant apprécier la vie d'un joueur des grandes ligues», a noté, non sans cynisme, un éditorialiste de The Independent cette semaine.

- Avec The Guardian, The International Herald Tribune, AFP, Reuters, The Independent.