Le photographe officiel du président géorgien Mikheïl Saakachvili et trois autres photographes de presse ont été arrêtés jeudi à Tbilissi pour espionnage et font face à des «accusations très sérieuses», a annoncé le ministère géorgien de l'Intérieur.

«Les détenus sont accusés d'avoir transmis des informations obtenues grâce à leur travail à une organisation agissant sous couverture pour des services de renseignement d'un pays étranger, contre les intérêts de la Géorgie», selon le communiqué.

Parmi les détenus figurent le photographe personnel de Mikheïl Saakachvili, Irakli Guédenidzé, son épouse Natia, également photographe, Zourab Kourtsikidzé, de l'agence européenne EPA, et Guiorgui Abdaladzé, employé au service de presse du ministère géorgien des Affaires étrangères, selon la même source.

Chakh Aïvazov, photographe de l'agence Associated Press, a été également interpellé mais rapidement relâché.

«Des accusations très sérieuses vont être portées» contre eux, a déclaré à l'AFP le vice-ministre géorgien de l'Intérieur Eka Zgouladzé, ajoutant qu'une enquête pour espionnage présumé était en cours.

«Je suis persuadée que mon fils n'est pas un traître», a déclaré la mère de Guédenidzé, Marika, sur la chaîne géorgienne Roustavi-2.

L'avocat d'un des photographes, Ramaz Tchintchaladzé, a pour sa part indiqué que l'affaire était classée «secret» et a refusé d'en révéler les détails, selon l'agence Ria Novosti.

Les arrestations, accompagnées de perquisitions domiciliaires, ont eu lieu dans la nuit de mercredi à jeudi.

«Ils ont perquisitionné toutes les pièces, ont pris tous les ordinateurs, le laptop de mon père et l'ordinateur de mon enfant, les téléphones portables de tous les membres de la famille et tous les CD», a déclaré l'épouse d'Abaladzé, Nestan Neïdzé, à l'agence géorgienne privée InterPressNews.

Un petit groupe de protestataires s'est rassemblé jeudi devant le siège du ministère de l'Intérieur, l'un d'eux tenant une affiche où le président Saakachvili était comparé à l'autoritaire président du Bélarus Alexandre Loukachenko, dont la police arrête souvent des journalistes.

Les autorités géorgiennes n'ont pas précisé dans l'immédiat pour quel pays travaillaient les photographes arrêtés.

Toutes les affaires d'espionnage des dernières années en Géorgie ont été liées à la Russie. Quatre Russes ont été condamnés mercredi soir en Géorgie à des peines allant de 11 à 14 ans de prison pour espionnage, a rapporté l'agence Ria Novosti.

Dans une première réaction officielle, la Russie a ironisé sur cette nouvelle affaire.

«Nous ne sommes pas étonnés que (les autorités) taxent les photographes d'espions et présentent cette affaire dans un contexte d'espionnage», a déclaré le porte-parole de la diplomatie russe Alexandre Loukachevitch cité par l'agence Ria Novosti.

«Cela montre le niveau de la démocratie en Géorgie», a-t-il ajouté.

En novembre dernier, la Géorgie avait annoncé avoir démantelé un important réseau d'espionnage russe et arrêté 13 suspects, dont quatre ressortissants russes.

La Russie, qui entretient des relations exécrables avec Tbilissi, avait alors dénoncé l'«"espionnite" antirusse chronique» du président géorgien.

Dans une interview mercredi à la radio Echo de Moscou, le ministre géorgien de l'Intérieur Vano Merabichvili avait affirmé que cette affaire avait porté un coup dur aux Russes mais que «tous les espions russes» n'avaient pas «encore été arrêtés».

La Russie et la Géorgie se sont livrées en août 2008 une guerre éclair pour le contrôle de la région séparatiste géorgienne de l'Ossétie du Sud. Le conflit s'est soldé par la défaite de Tbilissi et la reconnaissance par Moscou de l'indépendance de l'Ossétie du Sud et de l'Abkhazie, un autre territoire géorgien, non reconnue par Tbilissi et les pays occidentaux.