Vingt ans après la proclamation de son indépendance, la Croatie a obtenu vendredi le feu vert de Bruxelles pour devenir le 28e pays de l'Union européenne en juillet 2013.

Son voisin, la Serbie, frappe à son tour à la porte de l'UE après l'arrestation de Ratko Mladic.

La Commission européenne a proposé aux gouvernements de l'UE de boucler positivement les quatre derniers chapitres sur les 35 qui ont jalonné près de six ans de pourparlers avec Zagreb.

La Croatie peut ainsi devenir le 28e État membre de l'Union «à compter du 1er juillet 2013, si cette date indicative devait être retenue» par les gouvernements européens, a précisé le président de la Commission, José Manuel Barroso.

Les ministres des Affaires étrangères des 27 devraient se pencher sur le dossier dès le 21 juin à Luxembourg, selon des sources diplomatiques.

La Croatie a ainsi toutes les chances de devenir le deuxième pays issu de l'ex-Yougoslavie à rejoindre l'UE, après la Slovénie, qui fait partie du club depuis 2004.

Les négociations ont longtemps buté sur les questions de lutte contre la corruption, d'indépendance des magistrats, de poursuites contre les criminels de guerre et de coopération avec le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY) de La Haye.

«Je ne croyais pas l'an dernier que les Croates pourraient y arriver», a estimé la commissaire chargée de la Justice, Vivianne Reding. Mais «en l'espace d'un an, ils ont complètement réformé leur système judiciaire».

Sur ces questions ainsi que sur le droit de la concurrence, Zagreb sera toutefois soumis à un «suivi spécifique», tous les six mois, car «les engagements ont besoin d'être surveillés», a précisé le commissaire chargé de l'Élargissement, Stefan Füle.

Bruxelles devrait notamment s'intéresser au sérieux avec lequel seront menées les poursuites contre l'ex-premier ministre croate Ivo Sanader, recherché pour détournement de fonds en Croatie et en attente de son extradition par l'Autriche.

Certains pays comme la France ont proposé que d'éventuels reculs constatés soient sanctionnés le cas échéant en retardant les négociations d'un an.

Dans un entretien à l'AFP, le président croate Ivo Josipovic a parlé d'un «grand jour pour la Croatie». Et le premier ministre croate, Jadranka Kosor, a promis vendredi de poursuivre sur le «chemin des réformes».

Le traité d'adhésion pourrait être signé dès l'automne. Il nécessitera ensuite une ratification tant par un référendum en Croatie que par chacun des 27 États membres de l'UE.

Zagreb avait ouvert les négociations d'adhésion à l'UE en 2005, en même temps qu'Ankara. Ces dernières en revanche sont au point mort, du fait notamment du blocage persistant à propos de Chypre, membre de l'UE depuis 2004 et que la Turquie refuse de reconnaître, mais aussi d'une lassitude plus générale des Européens face à l'Élargissement.

Cette lassitude se fait aussi sentir en Croatie, où selon les derniers sondages, 44,6% de la population soutient l'adhésion de leur pays à l'UE, alors que 41,8% s'y oppose.

L'Union européenne avait solennellement promis des perspectives d'adhésion à l'ensemble des pays des Balkans en 2003. Pour Stefan Füle, la décision d'intégrer la Croatie «crée un nouvel élan» pour y poursuivre et accélérer l'élargissement.

Il a dit s'attendre à pouvoir recommander à l'automne l'ouverture de négociations d'adhésion avec de nouveaux pays de la région, citant la Macédoine, à condition qu'elle trouve une solution à son différend avec Athènes sur son nom.

La Serbie, voisine de la Croatie, qui vient de remplir une de ses obligations internationales en livrant au TPIY l'ancien chef militaire des Serbes de Bosnie Ratko Mladic après 16 ans de cavale, a, elle, bon espoir de se voir octroyer le statut de candidat.

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Quelques faits

Quelques faits et chiffres relatifs à la Croatie, dont la Commission européenne a proposé vendredi aux États membres de l'Union européenne une adhésion pour 2013 et de clore les négociations d'adhésion.

SITUATION: Pays de l'Europe du sud-est, la Croatie est bordée par l'Adriatique (ouest), la Slovénie (nord-ouest), la Hongrie (nord-est), la Serbie (est), la Bosnie-Herzégovine (sud) et le Monténégro (sud).

SUPERFICIE: 56 542 kilomètres carrés. La Croatie dispose de 1185 îles le long de ses côtes, de montagnes dans le centre et de plaines dans le nord-est.

POPULATION: 4,4 millions d'habitants (selon le recensement de 2001)

CAPITALE: Zagreb.

RELIGION: 89,63% de la population est catholique

LANGUE OFFICIELLE: croate.

HISTOIRE: La proclamation de l'indépendance de l'ancienne Fédération yougoslave, en 1991, a entraîné une guerre contre les Serbes de Croatie, soutenus par Belgrade, qui refusaient cette indépendance. Le conflit, qui a coûté la vie à 20 000 personnes, s'est achevé en 1995.

Le nationaliste Franjo Tudjman a dirigé la Croatie pendant toute la guerre et jusqu'à sa mort, en décembre 1999, conduisant le pays à l'isolement.

Un mois plus tard, des élections conduisaient au pouvoir une coalition de centre-droit, infligeant une cuisante défaite à la formation nationaliste de Tudjman, l'Union démocratique croate (HDZ).

Le centriste Stipe Mesic fut élu en février 2000 à la présidence. Il donna au pays un objectif européen et sera réélu en 2005.

La HDZ est toutefois revenue au pouvoir en 2003, mais le premier ministre Ivo Sanader en a fait une formation conservatrice moderne.

La Croatie a ouvert les négociations d'adhésion à l'UE en 2005.

Le social-démocrate Ivo Josipovic, le troisième président croate depuis la proclamation d'indépendance, a été élu en janvier 2010.

Dominée pendant des siècles par les Turcs et l'Autriche-Hongrie, la Croatie a proclamé en 1918 son rattachement au royaume des Serbes, Croates et Slovènes.

En 1941, elle forma un État indépendant (NDH) pro-nazi sous la direction du nationaliste Ante Pavelic, chef des oustachis. En 1945, elle devint l'une des républiques de la fédération yougoslave.

FORCES ARMÉES: la Croatie a rejoint l'OTAN en 2009. Ses forces armées comprennent 25 000 personnes.

INSTITUTIONS POLITIQUES: Démocratie parlementaire depuis 2000.

ÉCONOMIE: le tourisme constitue l'une des principales ressources du pays, grâce à la côte adriatique. Il représente entre 15% et 20% du Produit intérieur brut.

MONNAIE: kuna (HRK)

PIB: 45,9 milliards d'euros (2010), PIB par tête d'habitant 10 396 euros (Banque Nationale)

SALAIRE MOYEN MENSUEL: 5480 kunas (742 euros) (mars 2011)

CHÔMAGE: 18,2% (avril 2011)

CROISSANCE: contraction de 1,2% en 2009, croissance envisagée de 1,5% en 2011.

INFLATION: 1,1% en 2010

DETTE EXTÉRIEURE: 46,4 milliards d'euros, soit 99,7% du PIB (décembre 2010)

SITES INTERNET: www.vlada.hr (gouvernement), www.hnb.hr (Banque Nationale)