L'ancien chef militaire des Serbes de Bosnie Ratko Mladic, «extrêmement malade», a dénoncé vendredi les accusations «odieuses», de génocides notamment, contre lui, assurant avoir «seulement défendu (son) pays», lors de sa première comparution devant le TPIY.

«J'aimerais lire et recevoir ces charges odieuses qui pèsent contre moi», a lancé aux juges du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY) M. Mladic, 69 ans, arrêté le 26 mai en Serbie après une cavale de près de seize ans.

À l'arrivée des trois magistrats dans la salle d'audience de La Haye, M. Mladic, 69 ans, en costume et cravate grise, amaigri, a reçu l'aide des gardiens pour se lever. Avant de se rasseoir, il a gratifié les juges d'un salut militaire de la main gauche.

«J'ai défendu mon peuple et mon pays, et non pas Ratko Mladic», a affirmé d'une voix forte l'accusé, poursuivi pour génocides, dont le massacre de Srebrenica, de crimes contre l'humanité et de crimes de guerre commis durant la guerre de Bosnie (1992-1995) qui avait fait 100 000 morts et 2,2 millions de déplacés.

«Je n'ai pas tué des Croates en tant que Croates, j'ai seulement défendu mon pays», a-t-il insisté après avoir refusé de plaider coupable ou non des onze chefs d'accusation qui pèsent contre lui. Une nouvelle audience se tiendra le 4 juillet.

L'ancien général, transféré mardi à La Haye, avait affirmé après la lecture de ses droits par la greffière «être extrêmement malade». «J'ai besoin d'un peu plus de temps pour réfléchir à tout ce qu'elle vient de dire», a-t-il lancé. Selon sa défense en Serbie, il a souffert d'un cancer du système lymphatique.

«J'étais exposé à un stress très important, je n'ai que peu compris tout ce que cette jeune femme vient de nous lire», a-t-il poursuivi: «dans l'infirmerie de l'unité de détention, on m'a apporté trois classeurs, mais je n'ai rien lu de tout cela, je n'ai rien signé non plus, j'étais dans un état si mauvais».

Au juge Alfons Orie qui lui demandait s'il souhaitait s'exprimer avant la fin de l'audience, M. Mladic a répondu: «je ne veux pas qu'on me prenne sous les bras comme si j'étais un aveugle, je peux marcher tout seul».

«Je suis le général Mladic», a-t-il asséné: «je ne veux pas être conduit par d'autres personnes, le monde entier sait qui je suis.

Une partie des débats, consacrés à l'état de santé de l'accusé, s'est déroulée à huis clos, une vingtaine de minutes durant.

Impassible, le menton dans une main, Mladic avait auparavant écouté le juge Orie détailler les chefs d'accusation qui pèsent contre lui, concernent notamment le massacre de Srebrenica en juillet 1995, le pire depuis la Seconde Guerre mondiale, au cours duquel près de 8000 personnes avaient été exécutées.

«Quelques jours avant l'attaque, Ratko Mladic et d'autres ont formé l'objectif de tuer les musulmans en tuant les hommes et les garçons et en chassant les femmes et les personnes âgées. À la date du 11 juillet 1995, Ratko Mladic et d'autres ont commencé à mettre en oeuvre cet objectif», a lu le juge.

«Ratko Mladic, a-t-il poursuivi, était l'officier le plus haut gradé de l'armée des Serbes de Bosnie et à ce titre, avait le contrôle effectif. Il a échoué à prendre les mesures nécessaires et raisonnables pour empêcher la commission de ces crimes».

«Si seulement on pouvait le juger ici... J'aimerais qu'ils le conduisent ici et je le réduirais en petits morceaux», a déclaré à l'AFP Hanifa Djogaz, dont des proches avaient été tués lors du massacre de Srebrenica en juillet 1995, lors de la retransmission en direct de l'audience au mémorial de Potocari, dans l'ancienne enclave de Srebrenica.

«Je voudrais que Dieu le fasse brûler en enfer», a lâché sa voisine.

Le procès de M. Mladic ne devrait pas commencer avant plusieurs mois. Celui de Radovan Karadzic, accusé des mêmes crimes, avait démarré en octobre 2009, quinze mois environ avant son arrestation à Belgrade en juillet 2008.