Plus de 30 personnes, dont plusieurs étrangers, ont été interpellées samedi à Moscou au cours d'une marche homosexuelle interdite à deux pas du Kremlin attaquée par des fondamentalistes orthodoxes et violemment dispersée par la police.

Les manifestants avaient l'intention de déposer une gerbe à la tombe du Soldat inconnu près du Kremlin - en hommage à la guerre soviétique contre le régime nazi dont les homosexuels furent aussi les victimes.

Dès qu'ils s'approchaient du lieu préalablement bouclé par la police, ils se faisaient attaquer par des ultras orthodoxes, a constaté une journaliste de l'AFP.

Ils étaient ensuite plaqués au sol ainsi que leurs assaillants et conduits dans des camionnettes devant des touristes étrangers ahuris se promenant sur la place Rouge par ce samedi ensoleillé.

Les manifestants scandaient «La Russie sans homophobie!» portant des pancartes sur lesquels on pouvait lire «la Russie n'est pas l'Iran!».

Une jeune femme portant un T-shirt «j'aime une fille» et un drapeau arc-en-ciel a été attaquée par un groupe ultrareligieux orthodoxe.

Trente-quatre personnes ont été interpellées parmi lesquelles deux militants américains, Dan Choi, de l'association contre l'interdiction faite aux homosexuels de servir dans l'armée, et Andy Thayer, du «Gay liberation Network», ainsi que le Français Louis-George Tin, un Français, qui préside le comité Idaho contre l'homophobie.

«Nous sommes dans un véhicule de police, cinq Russes, deux Américains et moi-même. Ils nous ont interpellés de manière très grossière», a déclaré M. Tin à l'AFP, ajoutant qu'il était insulté en anglais par des policiers russes.

«Nous demandons au Conseil de l'Europe que soit suspendu le droit de vote de la Russie au Conseil de l'Europe», a-t-il poursuivi.

Le militant britannique Peter Tatchell, pionnier des défilés en faveur de l'égalité des droits pour les homosexuels et dirigeant de l'organisation Outrage!, a indiqué à l'AFP avoir réussi à s'échapper après une brève interpellation.

Il a salué le courage des homosexuels russes qui «se sont rassemblés près du Kremlin sachant qu'ils avaient de fortes chances d'être arrêtés et battus par les néo-nazis».

Depuis leur première demande en 2006, les homosexuels n'ont jamais obtenu le droit de manifester à Moscou et toutes leurs tentatives ont été dispersées sans ménagement par la police.

Vendredi, les homosexuels russes de l'association GayRussia avaient annoncé qu'ils refusaient de se plier à l'interdiction, reflétant selon eux «l'idéologie homophobe, nationaliste et cléricale» du pouvoir russe, très proche de l'Église orthodoxe.

Ils en appelaient au récent arrêt de la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) contre la Russie, pour qui

interdire de telles manifestations constituait une discrimination et une atteinte au droit de réunion.

Samedi, leurs assaillants, vêtus de noir et brandissant des croix orthodoxes et des icônes, s'étaient postés aux abords du parcours de la manifestation interdite.

«Nous devons empêcher cet événement de se produire», expliquait l'un d'eux à l'AFP, Léonid Simonovitch-Nikitch. «Dieu a brûlé Sodome et Gomorrhe, et il brûlera aussi Moscou si nous laissons ça se produire», a-t-il ajouté, évoquant un passage de la Bible, utilisé pour tenter de justifier la répression de l'homosexualité.

Il a ensuite déchiré et piétiné une photo du chanteur britannique Elton John, homosexuel revendiqué et qui fait figure d'icône dans le mouvement pour l'égalité des droits des homosexuels et des lesbiennes.