Les anciens présidents Valéry Giscard d'Estaing, Jacques Chirac ou François Mitterrand ont cultivé de nombreuses aventures extraconjugales, sans provoquer de vagues. Si médias et quidams français ont longtemps fermé les yeux sur les frasques amoureuses de leurs leaders, l'affaire DSK pourrait toutefois être le premier véritable scandale sexuel hexagonal.

Devant le libertinage de leurs hommes politiques, les Français ont souvent fait preuve d'une neutralité bienveillante. Du président Félix Faure, sous la IIIe République, la postérité aura surtout retenu sa mort, en 1899, dans les bras de sa maîtresse. Les aventures amoureuses des politiques sont souvent considérées comme relevant de la vie privée, même si elles sont parfois révélées au grand jour.

Ainsi, l'ancien président Valéry Giscard d'Estaing (1974-1981) est souvent présenté comme un grand séducteur. «VGE» a mis en scène sa popularité auprès de la gent féminine dans ses romans. En 2009, il raconte la passion entre un président français veuf et une princesse britannique. La ressemblance de ces deux personnages avec Valéry Giscard d'Estaing et Lady Diana n'avait rien de fortuit. Devant le déchaînement de la presse britannique et les moqueries de la presse française, VGE a confessé avoir laissé parler son imagination.

Mitterand

Le succès de son successeur François Mitterrand (1981-1995) est bien connu. Mais c'est surtout l'existence d'une compagne et d'une fille illégitimes qui a fait scandale en 1994: la deuxième famille est logée aux frais de l'État. De Jacques Chirac (1995-2006), on retient l'esprit gaulois. Sa femme, Bernadette, a elle-même affirmé en 2001 que son mari avait «un succès formidable» auprès des femmes. L'actuel président Nicolas Sarkozy a lui aussi alimenté de nombreuses rumeurs, plus souvent relayées dans la presse étrangère qu'en France même: d'abord pour ses déboires avec sa deuxième femme, Cécilia, puis pour les relations qu'on lui prête avec des journalistes, comédiennes ou femmes politiques.

L'appétit de DSK est aussi souvent évoqué à mots couverts. Le journaliste de Libération Jean Quatremer a affirmé hier sur son blogue que le fait d'en avoir parlé en 2007 lui a valu les foudres de certains de ses collègues et d'une partie de la classe politique.

«La presse française est très en retard dans sa lucidité sur sa société à dominante masculine et blanche qui sacralise le monde du pouvoir, ses préjugés dominants et minimise les violences faites aux femmes», a affirmé de son côté Edwy Plenel, fondateur du site d'information Médiapart.

Les affaires sentimentales n'étaient encore jamais devenues des scandales. L'arrestation de Dominique Strauss-Kahn pour agression sexuelle pourrait modifier profondément cette culture de la complaisance.

Photo: archives Reuters

Valéry Giscard d'Estaing en compagnie de la princesse Diana le 28 novembre 1994 au Château de Versailles.