Ruby? «Une mythomane». Les juges? comme les «Brigades rouges». Les tensions avec la France? «Très exagérées»... Le chef du gouvernement italien, Silvio Berlusconi, isolé au sein de l'Union européenne et aux prises avec la justice, se veut serein mais combatif.

Au cours d'un dîner organisé à Rome avec des journalistes étrangers, sous le sceau du plus grand secret mais abondamment révélé dans la presse, M. Berlusconi s'est livré mardi soir à une opération de charme.

«J'ai un talent pour la cordialité, pour rentrer dans l'estime des autres, établir un rapport d'amitié», a-t-il expliqué.

But non avoué de l'opération, commanditée par un groupe énergétique italien et organisée par un groupe de pression basé à Rome: dédramatiser les informations qui semblent mettre en difficulté le Cavaliere, 74 ans. Peinant à faire entendre sa voix sur le plan international, tant sur la Libye que sur l'immigration, il est aux prises avec quatre procédures judiciaires, dont une pour prostitution de mineure.

Sur cette affaire, dans laquelle il est accusé d'avoir eu des relations tarifées avec la jeune Marocaine Ruby, M. Berlusconi réaffirme que celle-ci est «mythomane», mais ajoute qu'il n'est pas «énervé» contre elle.

Car, en racontant les scènes torrides de bunga-bunga dans les résidences du milliardaire, elle l'a mis en difficulté «involontairement». Contrairement aux juges qu'il compare aux terroristes des Brigades rouges et avec lesquels il se déclare «en guerre».

Candidature en 2013

Mais quand il s'agit de politique, M. Berlusconi abandonne le ton guerrier, révèle qu'il envisage de ne pas se présenter aux élections législatives de 2013. Ou peut-être tout de même «conduire la liste», mais sans avoir de «rôle opérationnel», plutôt celui d'un «pater nobile».

Comme successeur à la tête de son parti, le Peuple de la Liberté, il dit songer à son ministre de la Justice, Angelo Alfano. Ce quadragénaire vient de faire adopter par les députés une loi qui raccourcit les délais de prescription et vise avant tout, selon l'opposition, à éviter une condamnation du président du Conseil pour corruption de témoin.

Alors que d'aucuns lui prêtent le rêve d'occuper le Quirinal, siège de la présidence de la République, M. Berlusconi répond : «non, non, je n'en ai aucune intention». À ce poste, il verrait plutôt son bras droit, Gianni Letta.

Sur le plan international, M. Berlusconi aplanit les tensions -"très exagérées par les journaux"- avec Paris à propos de l'afflux d'immigrés illégaux tunisiens. Certes, il devrait y avoir «plus de réciprocité» entre la France et l'Italie, mais le président Nicolas Sarkozy, qu'il rencontrera le 26 avril à Rome, est un «ami».

Il évoque aussi le choix «difficile» qu'a représenté pour lui la décision de participer à la coalition contre les frappes du régime du colonel libyen Mouammar Kadhafi, affirmant même qu'il a songé à démissionner.

Au cours des quatre heures qu'a duré le dîner, M. Berlusconi n'a pas raconté de blague, s'est étonnée la presse italienne. Tout de même, selon un participant, il n'a pas résisté à l'envie d'inviter les journalistes, sur le ton de la plaisanterie, à une soirée de bunga-bunga. Et a pris, à sa manière, la défense d'un de ses vieux amis, Emilio Fede, directeur de l'une de ses chaînes de télévision, poursuivi pour incitation à la prostitution de mineure.

Selon lui, les accusations de débauche à son égard sont ridicules: «il a 80 ans, et pour trouver son petit oiseau, c'est la chasse au trésor», a-t-il plaidé.