Plusieurs femmes en niqab ont été interpellées, verbalisées ou convoquées en justice pour avoir enfreint la loi sur l'interdiction du port du voile intégral dans l'espace public, entrée en vigueur lundi en France, ont annoncé mardi les autorités.

Au lendemain de l'entrée en vigueur de cette loi adoptée le 11 octobre 2010 après un débat houleux, le ministre chargé des Collectivités territoriales Philippe Richert a affirmé que «depuis lundi», quatre femmes voilées avaient été «verbalisées par les services de police», pour avoir enfreint cette loi en région parisienne.

La France est le premier pays européen à procéder à cette interdiction généralisée, qui concernerait quelque 2000 femmes dans le pays.

La loi interdit de se dissimuler le visage -avec un voile, un casque ou une cagoule- dans l'espace public, c'est-à-dire la rue, les jardins publics, les gares ou les commerces.

Si les forces de l'ordre n'ont pas le pouvoir de faire ôter leur voile aux personnes récalcitrantes, ces dernières encourent une peine maximale de 150 euros (209 $) d'amende et/ou un stage de citoyenneté.

Mardi, les déclarations officielles sur les premières verbalisations, en vertu d'une loi qui sera très difficile à appliquer selon des syndicats de policiers, n'étaient pas entièrement corroborées par les informations recueillies par l'AFP dans la capitale et sa banlieue.

À Paris, deux femmes en niqab, interpellées lundi pour avoir participé à des manifestations non autorisées contre l'interdiction du port du voile intégral devaient être convoquées devant un tribunal de police pour avoir enfreint cette législation, selon une source judiciaire.

Selon cette source, l'une d'elles est Kenza Drider, une femme de 32 ans venue lundi en train depuis Avignon (sud-est) pour «défendre (ses) droits européens». Devant de nombreux journalistes, elle avait assuré que si elle était verbalisée, elle paierait l'amende, mais déposerait ensuite «un recours devant la Cour européenne des droits de l'homme».

Or son interpellation n'était pas liée au port du niqab, mais au «non-respect de la déclaration de manifestation», selon la police.

Une autre femme intégralement voilée a été interpellée mardi à Saint-Denis (nord de Paris) et amenée au commissariat après avoir refusé de se dévoiler sur la voie publique. La femme, qui a retiré son niqab au commissariat, n'a pas été verbalisée, mais un rappel à la loi lui a été notifié, selon une source policière.

Sur le terrain, les policiers restaient prudents mardi: «les collègues savent qui sont, dans leur zone, les personnes susceptibles d'être verbalisées, mais ils refusent de partir bille en tête pour constater les infractions et créer d'éventuels incidents», a expliqué Thierry Depuyt, du syndicat Unsa-FO police dans le nord du pays.

«Si on intervient sans discernement, on risque un embrasement des cités alors que les femmes qui portent le niqab ou la burqa ne créent pas un trouble à l'ordre public comparable aux affaires de police ordinaires comme les violences ou le trafic de drogue», a-t-il ajouté.

Un constat partagé par un commissaire de police de Toulouse (sud-ouest), qui martèle que «la priorité de la police, c'est la délinquance».

De nombreux musulmans se sont opposés à cette loi, initiée par un parlementaire communiste et ensuite reprise par la droite, qui a été accusée de stigmatiser toute une communauté, estimée en France à entre 4 et 6 millions de personnes, soit la plus importante communauté musulmane d'Europe.