La forte poussée de l'extrême droite dimanche à des élections locales en France embarrasse la droite au pouvoir, divisée sur la question d'un «front républicain» pour faire barrage au parti de Marine Le Pen en vue du second tour dimanche prochain.

Le Parti socialiste (PS) de Martine Aubry obtient 25% des voix lors du premier tour des élections cantonales (au niveau des départements), alors que l'UMP de Nicolas Sarkozy, loin derrière, est à 17% et se retrouve talonnée par le Front national (FN - extrême droite) à 15%.

Le FN, à la tête duquel Marine Le Pen a succédé à son père il y a moins de trois mois, confirme une percée notable. Traditionnellement défavorisé par les scrutins locaux, le parti fondé par Jean-Marie le Pen avait obtenu moins de 12% aux régionales de 2010.

Au second tour dimanche prochain, dernier scrutin au suffrage universel avant la présidentielle de 2012, le FN peut jouer les trouble-fêtes dans 394 circonscritions.

Il se retrouvera en duel face au PS (204 cantons), mais aussi face à l'UMP (89) ou d'autres candidats. Il y aura également 5 triangulaires UMP-PS-FN.

L'état-major de l'UMP a d'emblée exclu «un front républicain», refusant de favoriser les socialistes pour faire barrage au FN en cas de duel, s'attirant les foudres de la gauche et suscitant un malaise grandissant à droite.

À droite et surtout au centre, le mot d'ordre était clair dimanche soir: «mobiliser» pour le second tour et tenter de rallier les indécis alors que ce scrutin a été marqué par une abstention record de 55,6%.

Lundi matin, le patron de l'UMP Jean-François Copé a maintenu son mot d'ordre: pas d'alliance avec le FN mais pas de front républicain non plus.

Il veut laisser les électeurs «libres de leur choix» dans les duels FN-PS.

Plusieurs ténors UMP se sont cependant clairement démarqués de la ligne officielle. La ministre de la Recherche Valérie Pécresse a affirmé que «personnellement», en cas de duel avec le FN, elle voterait pour la gauche.

Jean-Christophe Lagarde du Nouveau centre, parti partenaire de la majorité présidentielle, a appelé à voter pour le «candidat démocrate» restant en lice.

De son côté, Henri Guaino, conseiller de Nicolas Sarkozy, a affirmé son «opposition totale» à un front républicain, jugeant que ce serait «une erreur politique majeure».

La gauche a dénoncé une «ambiguïté coupable» de l'UMP, après avoir accusé ces dernières semaines le parti de Nicolas Sarkozy de faire le jeu de Marine Le Pen en favorisant le débat sur les thèmes fétiches de l'extrême droite (immigration, islam).

«Nous appelons à faire barrage au Front national et utiliser le bulletin de vote adéquat. Si c'est un bulletin de vote UMP, utilisez-le pour éviter que le Front national ne l'emporte», a déclaré lundi le porte-parole du PS Benoît Hamon.

«Oui, comme en mai 2002», a-t-il concédé, en référence à la présidentielle de 2002 qui avait vu des partisans du socialiste Lionel Jospin, exclu au premier tour, voter Jacques Chirac au deuxième tour pour faire barrage au FN.

Placée au centre du jeu, Marine Le Pen a salué un succès «historique» pour son mouvement.

«Le vote FN n'est plus exclusivement, comme on l'entend le dire trop souvent, un vote de protestation mais bel et bien un vote d'adhésion», a-t-elle estimé dimanche, jugeant «un second tour PS-Front national à la présidentielle de plus en plus probable».

Plusieurs sondages pour la présidentielle ont donné récemment Nicolas Sarkozy éliminé dès le premier tour de l'élection en 2012, arrivant derrière Marine Le Pen et le candidat socialiste, surtout si celui-ci est Dominique Strauss-Kahn, actuellement directeur général du Fonds monétaire international.