Seul devant les caméras du monde entier pour annoncer une opération militaire en Libye d'inspiration française, Nicolas Sarkozy est aussi parti à la reconquête de son image internationale, à un an d'une élection présidentielle plutôt mal engagée.

Au plus bas dans les sondages, le président français comptait sur cette année 2011 pour asseoir sa dimension internationale, servi par une double présidence du G8 et du G20.

L'offensive diplomatico-militaire du dirigeant français en Libye fait consensus dans la classe politique française, qui avait violemment critiqué en début d'année les cafouillages de la politique arabe de Paris, au moment des révoltes en Égypte et Tunisie.

L'opposition socialiste, qui avait attaqué les atermoiements de Nicolas Sarkozy et même son soutien aux régimes en place lors de la chute de Zine El Abidine Ben Ali et Hosni Moubarak, est contrainte à l'approbation.

«On ne salue pas avec enthousiasme le fait qu'on soit entrés en guerre», mais «c'est une décision grave qu'il fallait prendre», a dit dimanche son porte-parole Benoît Hamon.

Seule la dirigeante de l'extrême droite, Marine Le Pen, s'est démarquée de l'opération militaire internationale, à forte coloration française. «Est-ce que les Français ont envie que nos soldats entrent en guerre contre la Libye, alors que nous sommes embourbés en Afghanistan?», a-t-elle demandé.

Nicolas Sarkozy a cherché pendant le week-end à placer ses initiatives dans la dynamique des révoltes arabes.

«Des peuples arabes ont choisi de se libérer de la servitude dans laquelle ils se sentaient depuis trop longtemps enfermés», a-t-il déclaré à l'issue du sommet international sur la Libye qu'il avait convoqué samedi à Paris.

«L'avenir de ces peuples arabes leur appartient. Au milieu des difficultés et des épreuves de toutes sortes qu'ils ont à affronter, ces peuples arabes ont besoin de notre aide et de notre soutien», a-t-il précisé.

Selon la presse française et les observateurs, Nicolas Sarkozy cherche à retrouver la dynamique qui lui avait réussi au second semestre 2008, lorsqu'il assurait la présidence tournante de l'Union européenne.

Il s'était alors targué d'avoir joué un rôle important dans les efforts pour régler la crise russo-géorgienne et, au côté de l'ex-premier ministre britannique Gordon Brown, il avait contribué à élaborer des solutions pour éviter la faillite du système bancaire mondial.

Sur la scène intérieure, Nicolas Sarkozy est très affaibli. La montée du chômage, les résultats mitigés face à l'insécurité et les débats incessants sur l'immigration et l'islam font de lui un président qui bat des records d'impopularité.

A un peu plus d'un an de la présidentielle de 2012, les sondages le donnent battu très largement par le mieux placé des candidats socialistes, le patron du Fonds monétaire international (FMI), Dominique Strauss-Kahn. Selon certaines enquêtes, il pourrait même être éliminé dès le premier tour par Marine Le Pen.

La crise libyenne et l'option militaire risquée qu'il a choisie offrent à Nicolas Sarkozy une possibilité de rebondir.

Mais pour remettre sur les rails la diplomatie française, il a aussi dû faire appel fin février à un de ses concurrents potentiels à droite, l'ex-premier ministre Alain Juppé, pour remplacer Michèle Alliot-Marie au Quai d'Orsay. Elle y avait multiplié les gaffes et les erreurs de jugement.

Aujourd'hui, Alain Juppé et le premier ministre François Fillon apparaissent comme des recours à droite, si Nicolas Sarkozy était trop affaibli pour être lui-même candidat.