Le président français Nicolas Sarkozy s'est séparé dimanche de sa très contestée chef de la diplomatie Michèle Alliot-Marie et devait s'exprimer dans la soirée, dans une tentative de relancer une politique étrangère laissée sans voix par les révolutions arabes.

Le président français Nicolas Sarkozy a par ailleurs annoncé la nomination d'Alain Juppé, jusqu'alors ministre de la Défense, au ministère des Affaires étrangères en remplacement de Michèle Alliot-Marie, démissionnaire.

«Nous avons décidé de réorganiser les ministères chargés de la diplomatie et de la sécurité», a déclaré lors d'une allocution le chef de l'État.

Michèle Alliot-Marie avait annoncé plus tôt sa démission dans une lettre à Nicolas Sarkozy, tout en soulignant n'avoir «commis aucun manquement», en dépit de multiples maladresses en raison de vacances fin 2010 en Tunisie et d'une offre d'une coopération policière faite au régime tunisien de Ben Ali.

Depuis plus d'un mois, elle concentrait toutes les critiques contre la politique étrangère de la France, accusée d'être passive et attentiste face au mouvement de libération en cours, en Tunisie et Egypte notamment.

Le président français a aussi annoncé la nomination d'un sénateur, Gérard Longuet, au poste de ministre de la Défense en remplacement d'Alain Juppé, et celle de son plus proche collaborateur, Claude Guéant, au ministère de l'Intérieur et de l'Immigration, en remplacement de Brice Hortefeux.

À l'approche de la présidentielle de mai 2012, Claude Guéant est chargé de gagner la bataille contre la criminalité et l'insécurité, enjeux électoraux primordiaux pour Nicolas Sarkozy dans la perspective de la présidentielle de mai 2012.

Michèle Alliot-Marie, 64 ans, était devenue un poids pour Nicolas Sarkozy, en accumulant les maladresses. Elle avait concentré toutes les critiques adressées à la diplomatie française, accusée de proximité avec les régimes arabes autoritaires.

D'abord avec son offre de coopération policière au régime de l'ex-président tunisien face à la révolte populaire, le 11 janvier. Puis avec la polémique sur ses vacances passées en Tunisie fin 2010, au début du soulèvement, et ses voyages dans le jet privé d'un homme d'affaires lié au clan Ben Ali.

La crise de la diplomatie empoisonne le climat politique déjà très défavorable pour le président français, au plus bas dans les sondages.

Pour justifier ce remaniement, qui devait être annoncé en début de soirée, et exposer sa vision sur les révolutions dans le monde arabe, Nicolas Sarkozy devait prononcer une allocution radiotélévisée à 20H00 (19H00 GMT), d'une dizaine de minutes.

Selon son entourage, le chef de l'État français doit évoquer la situation en Libye, en Égypte et en Tunisie et «donner une feuille de route et les perspectives de la France dans un monde qui bouge énormément».

Ce remplacement, accompagné de quelques autres changements, intervient trois mois seulement après le dernier remaniement, le 14 novembre, qui était pourtant censé fournir à Nicolas Sarkozy une équipe resserrée et de combat pour la présidentielle de 2012.

Pour Nicolas Sarkozy, il devenait urgent de redresser la barre, en pleine présidence française des G8 et G20, sur laquelle il comptait également pour se relancer.

Avant même l'annonce officielle de la démission de la ministre des Affaires étrangères, l'opposition socialiste avait jugé que ce départ ne réglait «pas le problème», pointant la responsabilité du chef de l'État.

«Aujourd'hui, la voix de la France n'existe plus. C'est véritablement un naufrage, la diplomatie française», a estimé la dirigeante socialiste Martine Aubry.

Des critiques qui sont adressées au sein même de l'appareil diplomatique. Dimanche, un groupe de diplomates, le troisième en quelques jours à prendre la parole de façon anonyme, a dénoncé «la peur du changement» et l'obsession «de maintenir le statu quo» qui caractérisent, selon lui, la politique étrangère de Paris depuis de nombreuses années.