Le chef du gouvernement italien Silvio Berlusconi, accusé de recours à la prostitution de mineure et d'abus de fonction, dispose d'un arsenal juridique et parlementaire pour éviter ou retarder le début du procès Rubygate qui a été fixé mardi au 6 avril par le tribunal de Milan.

La juge Cristina Di Censo a opté pour un jugement immédiat, procédure accélérée du code pénal basée sur «l'évidence de la preuve», ce qui permet d'éviter la tenue d'une audience préliminaire mais ensuite le procès suit un cours normal, assez long en Italie.

M. Berlusconi est mis en cause pour avoir rémunéré entre février et mai 2010 les services sexuels d'une mineure, Ruby de son vrai nom Karima El Mahroug, un délit passible de 3 ans de prison en Italie. Il est également inculpé pour avoir utilisé sa position auprès de la police afin de la faire relâcher après son interpellation pour un vol dans la nuit du 27 au 28 mai.

Selon un avocat informé du dossier, dès la première audience la défense de M. Berlusconi mettra en doute la «compétence fonctionnelle» du tribunal de Milan dans un procès contre le président du Conseil pour abus de fonction (délit passible de 12 ans de réclusion et d'une peine complémentaire d'interdiction d'exercice de la fonction publique).

Les avocats du Cavaliere affirment en effet qu'il est intervenu en tant que Premier ministre parce qu'il était convaincu que Ruby était «la nièce du président égyptien Hosni Moubarak» et qu'il voulait préserver de bonnes relations avec ce pays.

Si cela devait être considéré comme une infraction, il devrait être, selon eux, jugé par «le tribunal des ministres», un collège de juges qui devraient être tirés au sort parmi les magistrats du tribunal de Milan.

Les trois magistrates qui jugeront M. Berlusconi en avril peuvent ne pas considérer cette requête comme légitime et dans un deuxième temps, la Chambre des députés, où M. Berlusconi dispose d'une majorité renforcée depuis quelques semaines, peut soulever lors d'un vote ce «conflit d'attribution».

Ce sera ensuite à la Cour constitutionnelle de trancher mais le procès ne serait pas suspendu pendant l'examen du recours. Au cas où la Haute cour renverrait le dossier devant «le tribunal des ministres», tous les actes accumulés par le parquet de Milan, y compris les auditions de témoins et écoutes téléphoniques, seraient annulés.

La défense de M. Berlusconi compte aussi contester la «compétence territoriale» du tribunal de Milan sur le recours à la prostitution de mineure en arguant que les fêtes qui auraient dégénéré en parties de débauche avaient lieu dans la villa de M. Berlusconi à Arcore et sont donc du ressort du tribunal de Monza. Mais là, c'est la Cour de cassation qui devrait statuer sur la compétence, une fois prononcée la sentence de première instance.

Dans l'immédiat, il est fort possible que la première audience du 6 avril soit reportée car les deux avocats de M. Berlusconi, Niccolo Ghedini et Piero Longo, sont député et sénateur de son parti et peuvent être contraints de rester à Rome pour une session parlementaire.

M. Berlusconi peut de son côté ne pas venir aux audiences et se faire représenter ou arguer d'un «empêchement légitime» lié à sa fonction pour justifier son absence.