Le président français Nicolas Sarkozy devait s'expliquer, lors d'une émission de télévision jeudi soir, sur le scandale des vacances de ministres en Égypte et en Tunisie et sur différents dossiers qui plombent son début d'année, comme la fronde inédite des juges.

Handicapé par une cote de popularité désastreuse à un peu plus d'un an de la présidentielle de 2012, le chef de l'État s'attellera à la tâche de reconquérir l'opinion, en répondant pendant une heure et demie aux questions de neuf Français, sélectionnés par la chaîne privée TF1.

Économie, sécurité, retraites, prise en charge des personnes âgées... Les thèmes abordés reflèteront les préoccupations quotidiennes des Français, en premier lieu le chômage.

Nicolas Sarkozy devra aussi aborder celui de la moralité de ses ministres, dont les pratiques ont choqué récemment.

À la veille de cette prestation, il a tenté mercredi de désamorcer le dossier le plus urgent, celui des vacances de Noël controversées de sa ministre des Affaires étrangères Michèle Alliot-Marie en Tunisie et de son Premier ministre François Fillon en Egypte.

La première est violemment critiquée pour avoir utilisé le jet d'un riche homme d'affaires lié à l'ex-président Zine el Abidine Ben Ali, alors qu'elle passait ses vacances au beau milieu de la révolte qui a abouti à la chute de ce régime ami de la France.

Le second se voit fragilisé après la révélation de ses vacances de fin d'année en Egypte, aux frais du président Hosni Moubarak, lui aussi confronté à une contestation populaire sans précédent dans son pays.

Des polémiques particulièrement mal venues pour Nicolas Sarkozy, qui lors de sa campagne en 2007 avait promis une «République irréprochable».

Mercredi, il a rappelé à l'ordre ses ministres, en leur demandant de «privilégier» la France pour leurs vacances et d'obtenir une autorisation spéciale au plus haut niveau pour tout séjour à l'étranger.

À titre personnel, le président, qui a lui-même passé des vacances de fin d'année au Maroc dans une résidence de la famille royale à Marrakech, est pour l'instant épargné par ces polémiques sur les voyages.

Depuis une dizaine de jours, l'opposition n'en finit plus de dénoncer «la confusion des genres», le «délitement de l'esprit public» ou encore l'«indécence» du pouvoir actuel.

L'opposant centriste François Bayrou a appelé jeudi Nicolas Sarkozy à «dire la vérité» aux Français. «Ils ont l'impression qu'il y a un monde pour les dirigeants et un monde pour les citoyens» et que «les règles qui y sont exigées ne sont pas les mêmes», a souligné M. Bayrou.

Pour corser encore les choses, le président français, qui stagne à 34% d'opinions favorables selon un récent sondage, doit faire face à une révolte sans précédent des juges, ulcérés par ses propos les mettant en cause dans une affaire retentissante de meurtre.

Jeudi, des manifestations étaient prévues dans des dizaines de villes en France, en point d'orgue d'une mobilisation entamée il y a une semaine. Et contrairement à ce qu'avait semblé anticiper le gouvernement, le mouvement bénéficie du soutien d'une majorité de Français (65%), selon un sondage BVA.

Nicolas Sarkozy, qui épingle régulièrement les juges pour leur manque de sévérité à l'occasion de faits divers médiatiques, avait mis le feu aux poudres le 3 février: il avait dénoncé des «dysfonctionnements graves» des services de police et de justice dans le suivi du meurtrier présumé d'une jeune fille de 18 ans, Laetitia, un délinquant récidiviste. Et promis des sanctions.

La révolte des juges, qui dénoncent un manque de moyens et des atteintes à leur indépendance, a pris une tournure inédite, la quasi-totalité des tribunaux tournant au ralenti après de nombreux reports d'audience.