Quelque 70 000 personnes ont manifesté samedi à Belgrade pour réclamer à l'appel de l'opposition des élections législatives anticipées, sur fond de grogne sociale, première manifestation d'une telle ampleur depuis l'arrivée au pouvoir de la coalition pro-européenne, en 2008.

Pendant un peu plus d'une heure, les manifestants venus des quatre coins de Serbie ont écouté devant le siège du Parlement les dirigeants du principal parti de l'opposition, le Parti serbe du Progrès (SNS), à l'origine du rassemblement, qui dénoncaient la situation socio-économique du pays et réclamaient des élections législatives anticipées, prévues normalement au printemps 2012.

«Nous ne demandons pas (que la coalition gouvernementale pro-européenne, en place depuis l'été 2008) quitte le pouvoir, mais qu'elle convoque des élections, pour que ce rassemblement se manifeste» dans les urnes, a lancé Aleksandar Vucic, le vice-président du SNS.

«S'ils ne nous entendent pas d'ici à deux mois, nous vous inviterons de nouveau (à se rassembler) et alors nous ne quitterons plus les rues de Belgrade tant qu'ils n'auront pas convoqué des élections», a-t-il ajouté.

«Donnez-nous deux mois pour les laisser convoquer des élections législatives anticipées», a renchéri le dirigeant du SNS, Tomislav Nikolic.

Si ce n'est pas le cas, «en avril, vous me trouverez ici, sur l'asphalte, et vous pourrez me rejoindre. Il n'y a pas de plus grande résistance, les autorités n'ont peur que de vous», a-t-il ajouté.

Il s'agit de la plus importante manifestation de l'opposition depuis l'arrivée au pouvoir de l'actuelle coalition gouvernementale pro-européenne, en juillet 2008, consécutive à sa victoire aux élections législatives de mai de la même année.

Mais c'est la première fois aussi que M. Nikolic réussit à organiser une manifestation d'une telle ampleur depuis la création à l'automne de 2008 de son parti, de sensibilité de droite nationaliste, né du schisme avec le Parti radical (ultra-nationaliste).

Les manifestants étaient au nombre d'environ 70 000 personnes, selon les médias présents sur les lieux, 55 000 selon la police.

Le rassemblement, bien organisé, s'est déroulé sans incident et dans le calme.

Les manifestants brandissaient des pancartes, pour certaines d'entre elles en anglais pour alerter l'opinion internationale, invitant le président serbe, Boris Tadic, à partir ou réclamant des «élections maintenant».

D'autres agitaient le drapeau serbe ou celui du SNS.

Une importante proportion de personnes d'un certain âge, dans la cinquantaine ou plus, s'était déplacée, ceux que les médias ont appelé parfois les «perdants de la transition» engagée depuis la chute du président yougoslave Slobodan Milosevic, en octobre 2000.

Plusieurs exprimaient leur angoisse devant l'avenir dans un pays frappé par un chômage massif (26,7%) et une forte inflation, alors que le revenu mensuel moyen est de 390 euros.

«C'est la misère qui nous amène ici. Nous voulons des changements, des élections. La corruption et les pillages sont en train de nous tuer», s'est exclamé Andjelka Gvero, 53 ans.

«Personne ne s'occupe de nous, les citoyens. Nos entreprises font faillite. Nous n'avons pas de travail. Il est temps que (la coalition pro-européenne au pouvoir) s'en aille», selon Nada, une commerçante au chômage de Novi Sad (nord).

Momcilo Zubic, un technicien au chômage, dans la quarantaine, est favorable à l'intégration européenne de la Serbie mais, tient-il à préciser, «nous voulons y aller avec dignité, et non pas misérables et sans le Kosovo», qui a proclamé son indépendance de la Serbie en février 2008.