Largement impopulaire, le gouvernement irlandais a été contraint de convoquer mardi des législatives anticipées pour le 25 février, malgré la quasi certitude d'un cuisant revers pour le parti du Premier ministre Brian Cowen, première victime de la crise de la dette en Europe.

Après des mois de crise politique, le gouvernement a finalement annoncé que les prochaines législatives, une première fois avancées au 11 mars, se tiendront le 25 février. La présidente Mary McAleese a signé dans l'après-midi la dissolution du Parlement, à la demande de Brian Cowen.

Peu auparavant, le chef du gouvernement s'était adressé pour la dernière fois aux députés, dans une intervention qui sonnait comme un discours d'adieu à la politique après 27 ans de députation. M. Cowen, qui bat tous les records d'impopularité, a annoncé lundi soir qu'il ne se présenterait pas à ces élections.

«Je sais que certaines des décisions de mon gouvernement n'ont pas été très populaires. Mais elles devaient être prises», a-t-il plaidé.

Arrivé au pouvoir en mai 2008, au moment où l'ancien «Tigre celtique» plongeait dans la récession, M. Cowen a dû faire face à la colère suscitée par des plans d'austérité de plus en plus draconiens, tandis que l'Etat renflouait à coups de milliards des banques au bord de la faillite.

L'estocade a été donnée en novembre lors de la signature du plan d'aide international, d'un montant de 85 milliards d'euros, dont 17,5 milliards à la charge de Dublin. L'appel à l'aide extérieure a été ressentie comme une humiliation par nombre d'Irlandais.

Le gouvernement Cowen «a lié le sort du pays aux infortunes des banques et nous a vendus à l'UE et au FMI», a dénoncé mercredi devant les députés Eamon Gilmore, leader du Labour (gauche), donnant le ton de la campagne.

«Le futur gouvernement va devoir construire un nouveau pays à partir des ruines de notre économie», a averti le leader du Fine Gael, Enda Kenny, vraisemblable futur Premier ministre.

Si l'on en croit les sondages, le Fine Gael et le Labour devraient former le prochain gouvernement à la tête d'une coaltion. Or les deux formations n'ont pas caché leur intention de renégocier certains aspects du plan de sauvetage international, dont ils estiment qu'il a été imposé à l'Irlande. Le leader du Fine Gael s'est ainsi rendu vendredi à Bruxelles pour avertir qu'il demanderait un meilleur taux d'intérêt que les 5,83% souvent jugés «punitifs» qu'exige l'UE en échange des prêts.

Si les enquêtes d'opinion se confirment, le gouvernement Cowen serait le premier d'Europe à être emporté par la crise économique de 2008-10 et par celle de la dette. L'Irlande a été le deuxième pays de la zone euro, après la Grèce, à bénéficier de plans de sauvetage de Bruxelles et du FMI.

La signature de l'accord international avait suscité sur l'île une crise politique sans précédent: à l'instar de l'opposition, les Verts, alliés clefs de la coalition au pouvoir, ont annoncé leur défection, n'acceptant de rester qu'à la condition que les législatives --initialement prévues à l'été 2012-- soient anticipées.

M. Cowen a de plus été victime d'une mutinerie au sein même de son parti, qui l'a poussé à la démission de son poste de leader de la formation pour être remplacé par Micheal Martin, ancien ministre des Affaires étrangères. C'est lui qui aura dorénavant la lourde tâche de mener le Fianna Fail aux législatives.