Pressions sur le pilote, volonté d'atterrir à tout prix malgré un épais brouillard: la partie polonaise est la seule responsable de l'accident de l'avion du président polonais Lech Kaczynski, en avril en Russie, selon les résultats de l'enquête rendus publics mercredi.

La réaction de la partie polonaise a été vive: «le rapport est incomplet», a dénoncé Edmund Klich, représentant polonais auprès du Comité intergouvernemental d'aviation (MAK), l'organisation regroupant des pays de l'ex-URSS qui a mené l'enquête sur l'accident.

M. Klich a regretté que les conversations entre la tour de contrôle de Smolensk (ouest de la Russie) et Moscou n'aient pas été versées au dossier.

Le ministre polonais de l'Intérieur Jerzy Miller a ensuite déclaré que Varsovie ne contestait pas «les reproches formulés à l'égard de la Pologne», mais a estimé que «les deux parties n'étaient pas entièrement préparées pour ce vol».

Le MAK a souligné que l'équipage avait tenté de poser l'avion malgré les avertissements des contrôleurs aériens russes.

Le chef de ce comité, Mme Tatiana Anodina a expliqué que l'appareil avait tenté d'atterrir malgré de «multiples informations sur les conditions météorologiques qui n'étaient pas adéquates».

Elle a déclaré que l'équipage avait renoncé à se diriger vers un autre aéroport en raison de «pressions psychologiques» de la part de hauts responsables polonais.

«La présence dans la cabine de pilotage de hauts responsables - le chef de l'armée de l'air et le chef du protocole - ainsi qu'une réaction négative attendue de la part du principal passager (Lech Kaczynski) ont constitué une pression psychologique sur l'équipage, influant sur sa décision de procéder à un atterrissage dans des conditions inappropriées», a-t-elle déclaré.

Elle a ajouté qu'une quantité d'alcool de 0,6 mg/l avait été mesurée dans le sang du chef de l'armée de l'air, le général Andrzej Blasik.

Aucun ordre direct d'atterrir du président polonais n'a cependant été enregistré par les boîtes noires de l'appareil.

A la suite de ces annonces, le Premier ministre polonais Donald Tusk, en vacances, a annoncé qu'il rentrait à Varsovie. Il avait jugé en décembre «inacceptable» le rapport préliminaire de l'enquête.

Une simulation du vol diffusée mercredi à Moscou montre que l'équipage a ignoré les mises en garde russes et du système d'alerte automatique de l'avion qui lui signifiait «PULL UP» («Remontez» en anglais) peu avant l'accident.

Par ailleurs, Mme Anodina a dénoncé les «insuffisances significatives dans l'organisation du vol et dans la préparation des membres de l'équipage».

La transcription des conversations dans la cabine de pilotage, publiée en juin par Varsovie, semblait déjà confirmer que les pilotes avaient ignoré les avertissements.

Jaroslaw Kaczynski, ex-chef du gouvernement et frère jumeau du défunt président, a dénoncé les conclusions russes.

«Ce rapport, c'est un camouflet pour la Pologne», a-t-il réagi. «Le rapport rend responsables les pilotes et la Pologne, de manière unilatérale et sans preuves», a-t-il affirmé.

Le Tu-154M, un avion de conception soviétique, qui transportait le président Kaczynski et des dizaines de hauts responsables polonais, s'est écrasé le 10 avril en tentant d'atterrir en plein brouillard à Smolensk. Tous ses 96 occupants sont morts.

Les passagers devaient assister aux cérémonies marquant le 70e anniversaire du massacre d'environ 22 000 officiers polonais prisonniers par la police secrète soviétique pendant la Seconde Guerre Mondiale à Katyn.

Cet accident était survenu dans le contexte d'une amélioration des relations entre Moscou et Varsovie, traditionnellement difficiles. Dmitri Medvedev a effectué début décembre la première visite d'État d'un président russe en Pologne en neuf ans.