«Je me sens fatigué», résume le chef des nationalistes flamand Bart De Wever, figure incontournable pour résoudre la crise politique belge, alors que la Belgique franchit lundi la barre des six mois sans gouvernement.

Malgré la pression des marchés financiers, aucune perspective de sortie de crise ne pointe à l'horizon.

Les Belges ont voté le 13 juin, il y a plus de 180 jours déjà, lors d'élections législatives qui ont consacré la victoire côté néerlandophone de la Nouvelle alliance flamande (N-VA), le parti de Bart De Wever prônant l'indépendance de la Flandre (nord), et, côté francophone, du Parti socialiste (PS) d'Elio Di Rupo.

Depuis, le temps semble s'être arrêté, d'Ostende à Arlon.

Alors que la Belgique préside l'UE jusqu'à fin décembre -efficacement, selon les milieux européens- et que ses voisins adoptent des plans de rigueur, les négociations pour la formation d'une nouvelle coalition gouvernementale n'ont pratiquement pas progressé.

Car, avant même de songer à mettre sur pied un gouvernement pour succéder à celui du chrétien-démocrate flamand Yves Leterme, qui gère depuis juin les affaires courantes, ou de s'attaquer aux problèmes budgétaires -22 milliards d'économies à trouver d'ici à 2015-, les partis flamands ont exigé l'adoption d'une profonde réforme du système politique belge.

Bart De Wever, qui ne réclame pas à ce stade l'indépendance mais une plus grande autonomie pour la Flandre, se dit «fatigué mais insatisfait» par ces six mois de négociation, dans une interview publiée samedi par le journal économique L'Echo.

Les francophones n'ont pas cédé à toutes ses demandes, même s'ils ont fait des concessions inimaginables il y a quelques mois encore.

Les négociateurs francophones ont en effet accepté le principe du transfert vers les régions -Flandre, Wallonie et Bruxelles- de compétences fédérales totalisant quelque 14 milliards d'euros de budget annuel.

Ils ont ensuite accepté de négocier un nouveau système fiscal confiant aux régions une partie de la collecte des impôts, bien que cela risque, estiment-ils, de trop favoriser la région la plus riche du pays, en l'occurence la Flandre.

C'est sur des aspects très techniques de cette réforme que tout bloque entre les quatre partis flamands et les trois formations francophones impliqués dans les négociations.

Le médiateur désigné par le roi Albert II, le socialiste flamand Johan Vande Lanotte, qui selon le journal Le Soir est «au bout du rouleau», poursuit néanmoins sa recherche d'un compromis.

Le climat de pessimisme dans lequel il travaille est d'autant plus grand que d'autres problèmes, tels les droits des francophones vivant en Flandre, restent à résoudre.

Pour le gouverneur de la banque centrale, Guy Quaden, la Belgique a pourtant besoin d'un nouveau gouvernement «dans les semaines à venir» afin d'éviter de devenir à son tour la cible des spéculateurs, alors que les taux d'emprunt de l'État belge se sont tendus.

Cela va-t-il conduire à un sursaut et à la formation d'un gouvernement? «La situation est la même que celle de la IVe République française avant mai 1958, mais sans De Gaulle», estime avec pessimisme le journaliste Charles Bricman.

Les négociateurs «ne s'imaginent toujours pas en partenaires d'une future coalition, ils se méfient maladivement les uns des autres», ajoute le commentateur sur son blog.

Une scission du pays n'est désormais plus un tabou mais elle rencontrerait de nombreux obstacles, y compris sur la scène internationale.

Reste donc l'hypothèse de nouvelles élections. Elles pourraient avoir lieu début 2011 mais la Belgique se réveillerait avec les mêmes problèmes au lendemain du scrutin, notent l'ensemble des observateurs.