L'homme fort du Kosovo depuis plus de dix ans, le premier ministre sortant Hashim Thaçi, joue gros dans les législatives de dimanche, dont les résultats s'annoncent serrés et dépendront dans une grande mesure du taux de participation.

«Un faible taux de participation favorise M. Thaçi», résume pour l'AFP l'analyste Krenar Gashi, rejoignant plusieurs commentaires de presse sur le scrutin de dimanche.

Ces élections législatives sont les premières organisées au Kosovo depuis la proclamation d'indépendance en février 2008.

Le Parti démocratique du Kosovo (PDK) de M. Thaçi ne devance plus que d'une marge très réduite, de l'ordre de 2%, la Ligue démocratique du Kosovo (LDK) du maire de Pristina, Isa Mustafa, selon les derniers sondages.

Le PDK est certes affaibli par le mécontentement grandissant de la population, notamment des jeunes, mais le parti de M. Thaçi jouit du soutien d'«une base électorale très disciplinée» qui lui permettra probablement de faire face à la poussée des formations espérant capitaliser sur l'exaspération de la population, estime M. Gashi.

Le Kosovo est l'un des pays les plus pauvres d'Europe, avec un taux de chômage de 48%, selon la Banque mondiale. Près de la moitié de ses deux millions d'habitants vit sous le seuil de pauvreté.

M. Thaçi a rendu «son pouvoir visible en investissant 27% du budget dans la construction de routes et un peu plus de 1% dans la mise en place du système juridique qui est pourtant jugé crucial», relève l'analyste.

Aux élections municipales de novembre 2009, seulement la moitié des inscrits avait voté et le résultat a été favorable à M. Thaçi.

L'inconnue de dimanche est de savoir dans quelle mesure l'électorat abstentionniste se rendra aux urnes cette fois-ci, risquant de mettre en péril le premier ministre sortant.

L'attitude de la minorité serbe, dont de nombreux représentants souhaitent se rendre aux urnes dimanche, pèsera aussi dans la balance.

Et pour la première fois, 70.000 jeunes souvent critiques de la situation disposeront du droit de vote.

Avec les abstentionnistes, ils pourraient déterminer l'issue du scrutin et remettre en cause le pouvoir de M. Thaçi.

Pourtant, lorsqu'il avait convoqué ces législatives anticipées, l'initiative avait été largement interprétée comme une manoeuvre pour réaffirmer son pouvoir, à l'approche d'un dialogue crucial avec la Serbie.

Ce dialogue, auquel appellent les Européens, doit être le premier depuis la proclamation d'indépendance, pour amorcer un déblocage entre Belgrade et Pristina.

Le fait que la LDK, membre il y a quelques mois encore du gouvernement de coalition de M. Thaçi, n'a pas eu le temps d'affirmer son opposition à son ancien partenaire gouvernemental pourrait aussi jouer en faveur du premier ministre sortant, relèvent des experts.

M. Mustafa, qui a pris les rênes de la LDK il y a quelques mois, n'a pas non plus pu former une coalition préélectorale qui aurait «augmenté ses chances de succès», a estimé M. Gashi.

Autre inconnue: le comportement de deux nouvelles formations qui, selon les derniers sondages, vont sans doute entrer au parlement et qui promettent du changement.

Le mouvement Auto-détermination d'Albin Kurti, crédité de 16% des intentions de vote, pourrait devenir la troisième force parlementaire.

Fryma e Re (Air frais), créé il y a quelques mois seulement et crédité de 6% des intentions de vote, pourrait également rejoindre le parlement qui compte 120 sièges.