La présidentielle en France n'est que dans 17 mois, mais la classe politique s'emballe déjà après l'annonce, à gauche, de la candidature de Ségolène Royal et la quasi-confirmation de celle du président actuel Nicolas Sarkozy.

Au Parti socialiste, l'organisation de «primaires» pour faire désigner le candidat par tous les sympathisants tourne à la cacophonie: une demi-douzaine de prétendants sont déclarés, alors que le vote n'est prévu qu'à l'automne 2011.

«À ce rythme, les primaires vont se transformer en machine infernale et bientôt en machine à perdre», a averti le député PS André Vallini.

La déclaration surprise lundi de Ségolène Royal, premier poids lourd à entrer dans la course, a changé la donne. L'ex-candidate à l'Élysée en 2007 a pris de vitesse ses deux principaux adversaires potentiels: le patron du FMI, Dominique Strauss-Kahn, qui caracole en tête des sondages, et la première secrétaire du PS, Martine Aubry.

Les deux s'étaient entendus pour ne pas se présenter l'un contre l'autre et désigner le candidat le plus tardivement possible afin de permettre à «DSK», contraint au silence par ses fonctions au Fonds monétaire, de n'annoncer sa décision qu'au dernier moment, en juin. Et ils espéraient bien que Ségolène Royal se joindrait à ce «pacte».

Désormais, ils se retrouvent sous pression pour accélérer un calendrier jugé par beaucoup «intenable».

Et fidèle à sa réputation de provocatrice, Ségolène Royal a même jugé que Dominique Strauss-Kahn serait «le meilleur... premier ministre que la France pourrait avoir». Des commentaires qui font enrager les partisans de DSK et ne vont pas améliorer les relations entre les deux rivaux, marquées par une animosité ancienne.

Le Monde révèle ainsi mercredi des commentaires peu amènes tenus par DSK sur sa rivale devant l'ambassadeur américain à Paris en mai 2006, lorsque tous deux se préparaient à se disputer l'investiture socialiste pour la présidentielle de 2007. La forte popularité de cette dernière dans les sondages est le résultat d'une «hallucination collective», jugeait-il alors selon le compte-rendu de l'ambassadeur, Craig Stapleton, obtenu par le site WikiLeaks, qui s'invite ainsi dans le débat politique français.

L'ambassadeur américain disait aussi de DSK que «tout en étant peut être le plus capable et le plus qualifié des candidats socialistes, il manque du feu sacré qui pourrait le propulser vers la victoire...». Un doute régulièrement distillé aujourd'hui encore par ses détracteurs.

En 2007, Ségolène Royal avait finalement remporté la primaire socialiste avant d'être largement battue par Nicolas Sarkozy.

À droite, une certaine fébrilité semble également de mise. Alors qu'il ne devait annoncer sa décision qu'à l'automne 2011, Nicolas Sarkozy a pour la première fois ouvertement affiché mardi son intention d'être candidat à sa succession.

Devant des parlementaires de son parti UMP, il a glissé au détour d'une phrase: «Moi, vous savez, je suis là pour deux mandats», ajoutant sur le ton de la plaisanterie: «Après, ce sera la dolce vita», dans une allusion à sa femme italienne Carla Bruni.

Certains interprètent cette déclaration comme une réponse aux sondages qui disent désormais que le premier ministre François Fillon serait le meilleur candidat à droite en 2012 et donnent Nicolas Sarkozy battu par la plupart des postulants de gauche, voire écrasé par DSK.

Ce qui a poussé le premier ministre à faire mercredi une mise au point: son entourage a fait savoir que la droite «a déjà son candidat» pour la présidentielle, en l'occurrence Nicolas Sarkozy et «qu'il n'y a pas de discussions à l'intérieur de l'UMP là-dessus».