Le tribunal de Vienne, qui juge les meurtriers présumés du dissident tchétchène Oumar Israïlov, a annoncé vendredi sa volonté d'interroger par vidéoconférence le président tchétchène Ramzan Kadyrov, soupçonné par la police autrichienne d'être derrière cette affaire.

Le juge Friedrich Forsthuber, qui préside l'audience, a demandé à un des avocats de la défense, Rudolf Mayer, qui avait réclamé une audition de l'homme fort de Grozny, de chercher à savoir si Ramzan Kadyrov, qui a toujours nié toute implication, serait prêt à répondre aux questions par vidéoconférence.

«Je propose une vidéoconférence avec le président Kadyrov. Cela nous permettrait de nous faire une idée plus directe de la situation», a souligné M. Forsthuber, jugeant cette solution plus efficace qu'une procédure d'entraide judiciaire avec la Russie.

Trois Tchétchènes comparaissent depuis mardi à Vienne pour le meurtre d'Oumar Israïlov, abattu en pleine rue à Vienne le 13 janvier 2009. Le dissident, passé à l'ouest en 2004, était devenu gênant pour le pouvoir. Il avait accusé le président Kadyrov de torture, notamment devant la Cour européenne des droits de l'homme.

Un rapport d'enquête du contrespionnage autrichien BVT désigne le dirigeant tchétchène comme le donneur d'ordre dans cette affaire. Selon le BVT, l'opération visait à faire revenir au pays le dissident, de gré ou de force. Cependant elle aurait mal tourné, conduisant au meurtre d'Israïlov.

Le parquet de Vienne a retenu cette thèse, mais a estimé ne pas avoir d'éléments suffisants pour poursuivre Kadyrov, suscitant les critiques d'ONG et du parti écologiste die Grünen.

Le cerveau présumé de l'opération, Otto Kaltenbrunner, un membre du commando, Turpal Ali Jeshurkaev, et un complice, Suleiman Dadaev sont sur le banc des accusés à Vienne, tandis que l'auteur présumé des coups mortels Letschka Bogatirov est en fuite depuis les faits.

Selon le parquet, il est policier en Tchétchénie et a été promu après le meurtre d'Israïlov.

Le procès doit notamment mettre en lumière le système d'intimidation de la diaspora tchétchène mis en place par Grozny. D'après plusieurs ONG, les réfugiés tchétchènes se sont plaints d'avoir été menacés par des émissaires du pouvoir de cette république russe du Caucase.

En 2009, outre Oumar Israïlov, des opposants à Ramzan Kadyrov avaient été tués, notamment à Dubaï, Moscou et Istanbul.

Prévu initialement jusqu'au 26 novembre, le procès devrait finalement durer au moins jusqu'au 25 janvier 2011, a annoncé le tribunal vendredi en raison du retard accumulé.