Le président français Nicolas Sarkozy a consenti jeudi à des aménagements à sa réforme des retraites, cruciale pour la fin de son mandat, sans satisfaire les syndicats qui durcissent la contestation avec des appels à des grèves illimitées.

Les mesures annoncées par le pouvoir permettent à certaines mères de trois enfants et aux parents de handicapés de continuer à partir à la retraite à 65 ans, au lieu des 67 ans prévus par la réforme, en bénéficiant d'une pension à taux plein.

Nicolas Sarkozy qui veut faire de cette réforme l'emblème de son engagement à «changer la France», refuse de revenir sur le coeur du projet, à savoir le report de l'âge minimal de départ en retraite de 60 à 62 ans, et de 65 à 67 ans pour une retraite à taux plein dans la quasi totalité des cas.

Le ministre du Travail Eric Woerth a déposé jeudi deux amendements devant le Sénat, la chambre haute du Parlement français, qui examine la réforme des retraites déjà votée par l'Assemblée nationale.

Ces mesures, d'un coût de 3,4 milliards d'euros, seront financées par des prélèvements sur les revenus du capital et sur certaines plus-values immobilières.

Des mesures jugées largement insuffisantes par les syndicats, à quelques jours d'une journée de mobilisation le 12 octobre et alors que se multiplient les appels à des grèves reconductibles (chemins de fer, énergie, transports parisiens).

«Ce ne sont pas des amendements de nature à modifier la critique fondamentale sur le projet de réforme», a estimé Bernard Thibault, leader de la CGT (gauche), l'un des deux principaux syndicats français.

«Cela fait toujours une très mauvaise réforme pour la masse des salariés et c'est sur cette base là que nous allons continuer à mobiliser le 12 octobre», a-t-il ajouté.

La CFDT (réformiste) a estimé de son côté que les concessions gouvernementales constituaient «un pas en avant» mais que le projet de loi demeurait «très insatisfaisant».

Au Sénat, la gauche a qualifié ces concessions d'«écran de fumée». «Vous théâtralisez les débats», a estimé le président du groupe socialiste, Jean-Pierre Bel.

«Le gouvernement nous mène dans une impasse», a estimé l'ancien premier ministre socialiste Laurent Fabius. «Comme le gouvernement ne veut pas discuter, notamment avec les organisations syndicales, vous avez une radicalisation qui risque de se produire et au bout de la radicalisation, on ne sait pas ce qui se passe», a-t-il encore déclaré.

Eric Woerth a rétorqué que le gouvernement ne travaillait pas «dans la tension» ni «sous la pression» et affirmé que le projet de loi sur les retraites était «un texte humain, pas un texte financier».

La majorité de droite au Sénat, et notamment les centristes, réclamaient depuis de longs jours un geste sur les deux points (familles nombreuses et handicapés).

Le président français avait déjà annoncé des aménagements sur les emplois pénibles et pour ceux qui ont commencé à travailler jeunes, au lendemain d'imposantes manifestations et grèves contre le texte le 7 septembre.

Samedi, lors de la quatrième journée d'action à l'appel des syndicats depuis début septembre, entre 900 000 et 3 millions de personnes (selon les sources) avaient manifesté, recueillant le soutien de 71% des Français, selon un sondage.

Le gouvernement considère que faire travailler les Français plus longtemps, à l'instar de leurs voisins européens, est la meilleure option pour répondre à des besoins de financement évalués à 70 milliards d'euros d'ici à 2030.