Les syndicats britanniques, réunis en congrès jusqu'à jeudi, sont montés au créneau pour défendre le droit de grève, déjà difficile à exercer au Royaume-Uni, et que le patronat aimerait restreindre encore plus avec l'aide du nouveau gouvernement.

La confédération des syndicats britanniques, le Trades Union Congress (TUC), a fait de la défense de ce droit l'un des principaux thèmes de son 142e congrès, organisé à Manchester (nord-ouest de l'Angleterre).

Elle a condamné solennellement «l'arsenal juridique» utilisé par les employeurs pour faire annuler des grèves et «l'intention des conservateurs de rendre ces lois encore plus draconiennes» après leur récente arrivée au pouvoir.

Le droit de grève au Royaume-Uni est un des plus restrictifs des pays développés et leur organisation ressemble à un parcours du combattant.

Une législation très sévère, adoptée dans les années 1980 et 1990 sous l'impulsion de Margaret Thatcher et jamais abolie par les travaillistes durant leurs 13 années au pouvoir (1997-2010), limite notoirement le recours à cette forme d'action.

La grève ne peut être invoquée qu'en cas de conflit affectant directement les conditions de travail des salariés, une disposition qui vise explicitement à empêcher les mouvements à motivation purement politique.

Autre obstacle, un syndicat doit obtenir l'accord de ses adhérents pour appeler à la grève, lors d'un vote à bulletins secrets suivant des procédures très strictes. Le tout doit être suivi du dépôt d'un préavis, également très codifié.

En s'appuyant sur ces lois, plusieurs employeurs ont réussi ces derniers mois à faire annuler par la justice des arrêts de travail, le plus souvent parce que le vote n'avait pas respecté scrupuleusement les règles.

Un cas en particulier a fait couler beaucoup d'encre, celui de British Airways: l'ex-compagnie aérienne nationale est parvenue à faire interdire en décembre un arrêt de travail de son personnel navigant, pourtant approuvé à une majorité écrasante (92,5%), en raison d'irrégularités au niveau du vote.

Rebelote en mai dernier, lorsqu'elle fait interdire de nouveau une grève pour vice de forme, avant qu'une cour d'appel ne donne raison au syndicat organisateur.

Et la menace de nouvelles restrictions au droit de grève se développe. Un rapport d'un centre de réflexion proche des conservateurs, Policy Exchange, publié juste avant le congrès du TUC, a proposé d'en durcir encore les conditions, en fixant un niveau de participation minimum pour que les votes sur les grèves soient valables.

Il veut aussi que les employeurs soient à nouveau autorisés à embaucher des intérimaires pour remplacer les grévistes, comme ils pouvaient le faire jusqu'en 2004.

La principale confédération patronale, la CBI, avait aussitôt salué ce rapport, qui reprend des propositions qu'elle avait elle-même présentées en juin au nouveau gouvernement dirigé par le conservateur David Cameron.

Le TUC voit dans ces projets un déni de démocratie et une atteinte aux droits fondamentaux des salariés. Son secrétaire général Brendan Barber dit toutefois espérer que le gouvernement ne cèdera pas à la tentation de durcir encore la législation.

«Je suis certain qu'il y aura des pressions pour imposer des restrictions encore plus sévères, et j'espère que le gouvernement y résistera. Il a signalé qu'il n'avait pas l'intention de modifier la législation, et j'espère qu'il s'y tiendra», a-t-il affirmé à Manchester.