La police italienne a mené mardi une opération de grande ampleur contre la mafia calabraise visant à interpeller plus de 300 personnes dans le sud de l'Italie mais aussi dans les régions prospères du nord, devenues «le poumon économique» de la 'Ndrangheta.

Cette opération, d'une ampleur sans égal depuis 1995, a mobilisé 3 000 policiers en Calabre, dans le sud, ainsi que dans plusieurs régions prospères du nord de l'Italie.

Des suspects ont été arrêtés notamment pour association mafieuse, meurtre, détention et trafic d'armes, extorsion de fonds, a indiqué la police dans un communiqué.

La police a également saisi des biens, des armes et de la drogue pour une valeur de plusieurs dizaines de millions d'euros, a précisé l'agence italienne Ansa.

«Il s'agit de la plus importante opération menée ces dernières années contre la 'Ndrangheta qui se voit touchée au coeur de son système criminel tant sur l'aspect organisationnel que patrimonial», s'est réjoui le ministre de l'Intérieur Roberto Maroni en adressant ses félicitations aux forces de police.

Parmi les personnes arrêtées figurent le «boss» de l'organisation en Lombardie - région dont Milan est la capitale -, plusieurs entrepreneurs travaillant dans le secteur de la santé, dont le directeur du département sanitaire de la ville de Pavia.

Ces arrestations «confirment que le nord de l'Italie est le véritable théâtre des opérations de la 'Ndrangheta», a déclaré à l'AFP le procureur antimafia Alberto Cisterna.

Le secteur de la santé est celui «qu'ils préfèrent car il leur permet d'établir des contacts avec des hommes politiques et l'administration publique», a-t-il ajouté.

Cette opération intervient après une série d'homicides commis dans le cadre d'une tentative, ratée, de prise de pouvoir au sein de l'organisation par  la branche du nord du pays, a-t-il souligné.

Les clans du Nord ont réalisé qu'ils constituaient «le coeur financier et politique de l'organisation», a expliqué Cisterna, mais la 'Ndrangheta veut «maintenir les rites et le management en Calabre, d'où viennent tous les boss».

Pour l'expert de la Mafia Lirio Abbate, journaliste à l'hebdomadaire L'Espresso, l'opération montre également que «la 'Ndrangheta est organisée de façon verticale et non horizontale comme on pouvait le penser». En outre, cette organisation a «le pouvoir de polluer les administrations communales qui étaient jusqu'à présent épargnées par l'assaut de la criminalité», a-t-il expliqué à l'AFP.

Selon lui, la 'Ndrangheta «a des capillarités dans le monde entier mais surtout dans le nord de l'Italie».

Ces dernières décennies, la 'Ndrangheta est devenue la plus importante et la plus redoutée des quatre organisations du crime en Italie, qui incluent la Camorra dans la région de Naples, Cosa nostra en Sicile et la plus petite Sacra corona unita (SCU) dans les Pouilles (sud-est).

Selon l'institut italien spécialisé Eurispes, le chiffre d'affaires de la 'Ndrangheta atteint quelque 44 milliards d'euros, grâce en particulier au trafic de drogue et d'armes.

Lundi, la police avait saisi des biens d'une valeur de 1,3 milliard d'euros dans deux opérations séparées visant à la fois la 'Ndrangheta et la Camorra.

Celle visant la 'Ndrangheta a permis la saisie de biens d'une valeur de 330 millions d'euros appartenant à l'homme d'affaires Gioacchino Campolo, surnommé «le roi du poker».

La police a également saisi des appartements, des terres et des complexes touristiques d'une valeur estimée à un milliard d'euros dans une opération contre le clan Casalesi, l'un des plus puissants de la Camorra.