Le pouvoir du président français Nicolas Sarkozy bénéficiait d'un répit jeudi dans la crise politique née d'une succession d'accusations de conflits d'intérêts et de financement illégal, avant la présentation la semaine prochaine d'une réforme cruciale des retraites.

L'ancienne comptable de l'héritière des cosmétiques L'Oréal Liliane Bettencourt accuse le gestionnaire de fortune de la milliardaire d'avoir remis en mars 2007 à l'actuel ministre du Travail Eric Woerth, alors trésorier du parti majoritaire UMP, 150.000 euros pour la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy.

Claire Thibout, l'ancienne employée de la milliardaire, a été entendue de nouveau jeudi par la police et confrontée à Patrice de Maistre, le gestionnaire de fortune, chacun restant sur ses positions.

Mme Thibout a maintenu ses propos tenus aux enquêteurs et au site d'information Mediapart, auxquels elle avait affirmé que Patrice de Maistre lui avait demandé d'aller chercher 150.000 euros à la banque avant l'élection présidentielle de 2007, selon une source judiciaire.

Ces propos sont contestés par le gestionnaire de fortune.

Selon les quotidiens Le Monde et Le Figaro, Claire Thibout est revenue mercredi soir devant les policiers sur une partie de ses propos, niant que Nicolas Sarkozy, quand il était maire de Neuilly (ouest de Paris) de 1983 à 2002, recevait une «enveloppe» des Bettencourt.

Des propos «faux» et «romancés», selon Mme Thibout, citée par les deux journaux. Pour sa part, Mediapart «maintient l'intégralité de ses écrits».

Les premières déclarations de Claire Thibout avaient déclenché l'ouverture d'une enquête de la justice sur d'éventuels dons illégaux et une véritable crise au plus haut niveau de l'Etat, du fait de la mise en cause d'Eric Woerth, chargé de la réforme cruciale des retraites.

Ce rebondissement s'ajoutait à une série de scandales, qui ont entraîné la démission de deux ministres de second plan dimanche dernier.

Plus d'un Français sur deux (55%) juge d'ailleurs que Nicolas Sarkozy doit procéder à un remaniement de son gouvernement, selon un sondage CSA. Une perspective rejetée jeudi par le porte-parole du gouvernement, Luc Chatel: «ce n'est pas pour maintenant».

Le président s'est borné mercredi à appeler ses troupes au «sang froid», ignorant les appels à un changement de gouvernement, tandis qu'Eric Woerth a décidé de porter plainte pour «dénonciation calomnieuse».

L'homme au centre du scandale politico-fiscal, qui doit présenter mardi en Conseil des ministres la délicate et impopulaire réforme des retraites, semblait également devoir être conforté au moins sur un point de cette affaire dans laquelle il est mis en cause à plusieurs titres.

Car l'Elysée dit attendre avec sérénité la publication, initialement attendue vendredi, mais qui devrait finalement être rendue publique lundi au plus tard, d'un rapport administratif interne sur la gestion du dossier fiscal de Liliane Bettencourt, dont M. Woerth est soupçonné d'avoir couvert de possibles fraudes.

Eric Woerth est accusé de «conflit d'intérêts» pour avoir été ministre du Budget (de 2007 à mars 2010) à une époque où son épouse gérait une partie de la fortune de l'héritière L'Oréal.

Dans le cadre de cette affaire tentaculaire née au départ d'un conflit familial chez les Bettencourt, l'opposition lui reproche aussi d'avoir conservé la double casquette de ministre et de trésorier du parti présidentiel UMP.