Le président français Nicolas Sarkozy a fait savoir mercredi qu'il envisageait un remaniement ministériel en octobre, face aux affaires qui minent le gouvernement et font dire à l'opposante socialiste Ségolène Royal que le sommet de l'État est «aujourd'hui corrompu».

Nicolas Sarkozy «réorganisera le gouvernement en octobre et tirera sévèrement les conséquences du comportement de ministres», ont déclaré deux députés du parti présidentiel UMP, à l'issue d'une réception de parlementaires au palais de l'Elysée.

L'opposition de gauche a franchi une nouvelle étape dans son offensive sur l'affaire de la milliardaire Liliane Bettencourt, devenue pour le pouvoir l'embarrassante affaire Éric Woerth. «Le système Sarkozy est aujourd'hui corrompu», a asséné Ségolène Royal, l'ancienne candidate socialiste à l'élection présidentielle de 2007.

«C'est un pouvoir qui mélange les biens privés et les biens publics», «c'est un pouvoir qui perd tout sens du bien commun», un «pouvoir qui profite d'une totale impunité», a lancé mardi soir Ségolène Royal sur la chaîne de télévision française TF1, suscitant des réactions outrées à droite.

Depuis maintenant plus de dix jours, le ministre du Travail Eric Woerth est accusé par l'opposition de «conflit d'intérêts» dans le cadre de l'affaire sur la gestion de la fortune de Liliane Bettencourt, la femme la plus riche de France.

Des écoutes pirates révélées par la presse laissent entendre que l'ancien ministre du Budget (2007-mars 2010) était au courant de possibles fraudes fiscales de l'héritière du géant des cosmétiques L'Oréal, dans la mesure où son épouse gérait en partie la fortune de Mme Bettencourt depuis 2007.

Réclamant une «enquête impartiale» sur cette affaire, Mme Royal a fustigé un «effondrement des valeurs morales», se demandant «dans quel autre pays, un ministre serait encore en place dans les conditions que les Français connaissent aujourd'hui».

La droite faisait bloc mercredi derrière un ministre clé, en charge de l'impopulaire réforme des retraites, chantier phare de la fin du mandat de Nicolas Sarkozy. Ténors du parti présidentiel UMP et ministres ont dénoncé la «démagogie» et les «propos inadmissibles» de Mme Royal, qui «a choisi depuis bien longtemps d'agresser le président de la République», selon le porte-parole de l'UMP Frédéric Lefebvre.

Le patron des parlementaires UMP Jean-François Copé a aussi dénoncé «les propos de haine» de Ségolène Royal, les apparentant à ceux de l'extrême droite.

Mercredi, la presse française faisait à nouveaux ses gros titres sur l'avenir incertain d'un ministre passé en quelques jours du statut de premier ministrable à celui de fusible: «Peut-il tenir?» demandait Libération (gauche) en une, tandis que Le Figaro (proche du pouvoir) citait des élus de l'UMP peu convaincus par la sérénité affichée par l'Elysée face à une «opinion remontée».

Cette affaire survient alors que les révélations sur le train de vie dispendieux de ministres ou la mise en question de leur probité se multiplient: achat de 12 000 euros de cigares cubains sur fonds publics, logements de fonction occupés par la famille de ministres, frais d'hôtel hors de prix, double rémunération, permis de construire illégal...

Dans l'affaire Woerth, le PS a opté pour une stratégie du «supplice chinois», consistant à demander chaque jour des «éclaircissements» sans toutefois exiger la démission d'Eric Woerth.

Les socialistes ont demandé mercredi, à l'Assemblée nationale, la création d'une commission d'enquête parlementaire visant à faire la lumière sur cette affaire Woerth/Bettencourt.