L'heure est à l'austérité budgétaire en France, mais le gouvernement ne prêche pas par l'exemple, ce qui complique d'autant sa tâche face à une population déjà largement éprouvée par la crise.

Depuis quelques semaines, plusieurs élus influents ont dû rendre des comptes d'embarrassante façon après avoir été blâmés par Le canard enchaîné, qui multiplie les révélations.

 

Première à tomber au champ d'honneur, l'ex-ministre du Logement, Christine Boutin, qui s'est vu reprocher de recevoir un salaire mensuel de près de 10 000 (environ 12 600$CAN) pour une mission de consultation sur la mondialisation. Somme à laquelle s'ajoute une rente parlementaire mensuelle de l'ordre de 6000 (7600$CAN).

«Cette mission correspond à un travail de fond à mener dans la perspective de la présidence française du G20», a d'abord plaidé Mme Boutin en assurant que sa rémunération avait été fixée conformément aux textes réglementaires en vigueur.

Le porte-parole du gouvernement, Luc Chatel, a aussi assuré qu'il n'y avait «rien de scandaleux» à l'affaire, même si, d'après Le canard enchaîné, l'attribution de ce salaire visait d'abord et avant tout à acheter la paix avec Mme Boutin après son exclusion du gouvernement.

«République bananière»

Les hauts cris de l'opposition, qui parlait de «gabegie» et de «république bananière», et l'embarras du gouvernement ont fini par convaincre la principale intéressée de renoncer à sa rémunération.

«Je suis en train de créer une jurisprudence puisqu'il y a beaucoup de gens dans cette situation», a-t-elle déclaré.

Le journal satirique a aussi critiqué le ministre de l'Industrie, Christian Estrosi, qui s'est fait reprocher de disposer de deux logements de fonction, l'un d'eux étant dans les faits occupé par sa fille.

Le politicien a cherché à se défendre en soulignant que le second appartement était une simple «chambre» adjacente à ses bureaux, sans réussir véritablement à convaincre les médias.

La secrétaire d'État à la Ville, Fadela Amara, a ensuite été placée sur la défensive pour avoir logé des membres de sa famille dans un appartement de fonction qu'elle n'utilise pas.

«À l'occasion, ces heureux sous-locataires ont le droit de profiter des talents du cuistot mis à la disposition de la sous-ministre et d'un maître d'hôtel», a relevé Le canard enchaîné.

Réduire le déficit

Ces révélations sont survenues alors que le gouvernement annonce d'importantes mesures budgétaires qui doivent permettre de réduire le déficit public à moins de 3% du PIB en 2013.

Samedi, le premier ministre François Fillon a annoncé devant un parterre de partisans que le gouvernement devait réduire ses dépenses de près de 50 milliards d'euros en trois ans pour y parvenir.

Cette cible sera notamment atteinte en continuant de ne remplacer qu'un fonctionnaire sur deux au moment du départ à la retraite, une mesure controversée qui crée déjà des tensions importantes en éducation et en santé.

Le député socialiste Julien Dray a déploré à la radio que cette «purge violente» se fasse au détriment «de tous ceux qui ont besoin d'un État puissant, fort, d'une intervention publique, de la solidarité».

«C'est sur les classes moyennes et les classes populaires que repose l'effort», a-t-il déploré.

Les annonces du gouvernement risquent d'alimenter la grogne des Français, qui jugent déjà leur société trop inégalitaire.

Selon un sondage réalisé en avril dernier, 73% de la population pense que le pays est «assez» ou «très injuste», un résultat similaire à celui observé au Brésil, ce qui démontre, au dire des chercheurs, une «sursensibilité» à cette question.