Un long feuilleton politique s'est conclu hier avec le couronnement du chef conservateur David Cameron comme premier ministre britannique. Il s'est entendu avec le chef libéral-démocrate Nick Clegg pour former une coalition, mettant fin à une intrigue qui tenait le pays en haleine depuis les élections de jeudi dernier.

Le nouveau premier ministre, le plus jeune depuis 1812, s'est adressé à la nation devant la célèbre porte noire de Downing Street en soirée. Pour faire face aux nombreux problèmes sociaux et économiques du pays, «(il) vise la formation d'une vraie coalition entre les conservateurs et les libéraux-démocrates», a dit l'homme de 43 ans avec sa femme Samantha, enceinte de 5 mois, à ses côtés.

Il a poursuivi: «Nick Clegg et moi sommes résolus à mettre de côté nos différences et à travailler dur dans l'intérêt national.» Il s'agit du premier gouvernement de coalition depuis 70 ans en Grande-Bretagne.

David Cameron, qui connaît une carrière météorite depuis son accession à la direction du parti en 2005, redonne ainsi le pouvoir aux conservateurs après 13 ans dans l'opposition.

Il a nommé nul autre que Nick Clegg au poste de vice-premier ministre. Selon des informations filtrées dans les médias, des libéraux-démocrates occuperont quatre autres postes de ministre.

Tractations turbulentes

Les conservateurs, qui avaient gagné les élections sans majorité absolue, ont ainsi remporté une entente farouchement disputée.

Nick Clegg, maître du jeu, avait fait monter les enchères en introduisant les travaillistes dans le bal des négociations lundi matin, en échange d'une promesse de départ de Gordon Brown.

Or, il était clair, hier matin, que les pourparlers avec les travaillistes étaient en péril. Plusieurs ministres s'opposaient à une coalition avec les libéraux-démocrates.

«Nous devons respecter les résultats des élections. Nous ne pouvons nier le fait que nous les avons perdues», a affirmé Andy Burnham, ministre de la Santé sortant.

Une alliance avec les «Lib Dems» serait une «coalition de perdants», a dit de son côté David Blunkett, ancien ministre toujours influent.

Vers midi, les travaillistes ont confirmé que les négociations avaient avorté.

Foule à Westminster

Gordon Brown, qui s'était fait martyr pour une cause perdue, a donc dû faire ses boîtes.

Dans un discours d'adieu émouvant, il a souligné «le privilège» qu'il a eu à servir son pays pendant presque trois ans. «Maintenant que j'abandonne le second rôle le plus important qu'il m'ait été donné, je chéris davantage le premier rôle que j'occupe, celui d'homme de famille», a-t-il dit.

Dans un geste théâtral, Gordon Brown et sa femme Sarah ont quitté la résidence de Downing Street par la porte de devant, en prenant par la main leurs deux fils, rarement vus en public.

Signe que ce feuilleton a captivé la nation, des centaines de personnes se sont agglutinées devant le bureau du cabinet, dans Westminster, où les conservateurs et les libéraux-démocrates ont finalisé leur entente hier soir.

Des badauds et des journalistes surveillaient la porte principale avec fébrilité. «Je suis ici depuis trois heures, a affirmé Richard Wimbush à La Presse. C'est un moment historique. Il était temps qu'on se débarrasse de Gordon Brown.»

«Tout le monde regardait les nouvelles en direct au bureau, a dit se son côté Hayley Baker, qui était à vélo. Notre politique a rarement été aussi excitante.»