Le premier ministre Gordon Brown, battu aux législatives de jeudi, a remis mardi soir sa démission à la reine, laissant la voie libre au conservateur David Cameron qui finalisait une entente avec les libéraux-démocrates (Lib Dems).

«J'ai informé le secrétaire particulier de la reine de mon intention de remettre ma démission», a déclaré Gordon Brown, très ému, sur le perron devant la porte noire du 10, Downing Street. «Si la reine accepte, je lui conseille d'inviter le chef de l'opposition (le conservateur David Cameron ndlr) à tenter de former un gouvernement», a-t-il ajouté. «Ma démission de chef du parti travailliste prend effet immédiatement», a-t-il ajouté dans une brève déclaration, avant de quitter pour la dernière fois le siège du pouvoir, tenant par la main ses deux fils et son épouse Sarah.

Quelques minutes plus tard, sa jaguar blindée entrait au palais de Buckingham, résidence londonienne de la reine Elizabeth II, afin de lui remettre officiellement sa démission.

M. Brown entend également démissionner de son siège de député et prendre sa retraite politique, selon son entourage.

Parallèlement et après cinq jours de tractations, l'annonce d'un accord paraissait imminente entre les conservateurs et les libéraux-démocrates, en vue de la formation d'un nouveau gouvernement.

L'installation de David Cameron à Downing Street mettrait fin à 13 ans de gouvernements travaillistes, dont près de trois sous Gordon Brown, qui avait succédé à Tony Blair en juin 2007 sans passer par les urnes.

Une entente Lib Dems-Tories devrait encore recueillir l'approbation à la fois du groupe parlementaire et de l'organe exécutif des libéraux, à chaque fois dans une proportion des trois quarts des voix. Ces deux corps devaient se réunir ce mardi à 19H30 GMT.

Le libéral Simon Hughes, figure de la gauche du parti plus favorable à un accord avec le Labour, a déclaré être «prêt à soutenir» une entente avec les Tories. «Je voterai avec ma tête plutôt qu'avec mon coeur... C'est nettement mieux d'être dans le gouvernement qu'en dehors», a-t-il dit.

Les députés Tories devaient se réunir dans la soirée, vers 19H00 GMT. La dissidence sera «nulle», a assuré un député Tory, Nigel Evans.

Auparavant dans la matinée, Lib Dems et Labour s'étaient rencontrés pendant trois heures mais, selon plusieurs médias, les négociations auraient capoté en raison d'une opposition de la part de certains travaillistes. Les libéraux auraient alors douté de la capacité du Labour à tenir ses promesses.

«Des problèmes demeurent sur la capacité du Labour à respecter ses engagements et sur sa cohésion», a indiqué un responsable du Labour à la BBC.

Arrivés en troisième position aux législatives de jeudi dernier, les Lib Dems étaient courtisés à la fois par les conservateurs, victorieux du scrutin mais sans réussir à dégager une majorité absolue, et les travaillistes, deuxièmes du scrutin.

Gordon Brown avait annoncé lundi dans un surprenant revirement l'ouverture de négociations parallèles avec les libéraux, offrant de démissionner de la tête de son parti et donc du gouvernement, d'ici à l'automne, pour faciliter les discussions. Nick Clegg, chef des Lib Dems, avait à plusieurs reprises fait part de sa réticence à négocier avec un Labour dirigé par Gordon Brown.

Face à la surenchère travailliste, les Tories avaient amélioré leur offre in extremis lundi soir, proposant un référendum sur la réforme du système électoral jugé inique par les Lib Dems, s'alignant ainsi sur le Labour qui s'est déjà engagé à revoir le mode de scrutin.

Les marchés britanniques étaient fermés à l'annonce officielle d'un accord, mais ils avaient eu un brusque sursaut lors des premières informations des médias évoquant une entente imminente.

Une alliance entre conservateurs et libéraux rassemble 363 sièges, soit plus que les 326 nécessaires pour la majorité absolue. En revanche, une alliance Labour et Lib Dems n'aurait rassemblé que 315 sièges.