Gordon Brown a cherché à faire oublier sa bévue de la veille en vantant son expérience économique jeudi lors du dernier débat télévisé avant les élections en Grande-Bretagne, mais il a peiné à convaincre et a été éclipsé par le conservateur David Cameron.

Selon une moyenne des cinq sondages instantanés publiés après l'émission, M. Cameron était donné gagnant par 37% des personnes interrogées, largement devant le Premier ministre (25,6%). Le Libéral-démocrate Nick Clegg s'intercalait (32%), confirmant l'impression favorable laissée lors des deux premiers débats.

La presse était unanime à reconnaître la victoire de M. Cameron, favori de longue date des sondages mais qui n'avait pas été à la hauteur des attentes lors des débats précédents.

Il «passait le plus important entretien d'embauche de sa vie (...) mon impression est que la plupart des téléspectateurs jugeront qu'il l'a réussi», notait Martin Kettle, éditorialiste au Guardian (centre-gauche).

«M. Clegg ne semblait plus le petit nouveau et M. Brown était embarrassé par le handicap de ses 13 années au pouvoir. C'est M. Cameron qui semblait faire l'affaire», approuvait le Daily Telegraph (droite).

Attaquant le débat bille en tête, M. Brown n'a pas hésité à faire allusion à ses déboires de mercredi, lorsqu'il avait traité de «sectaire» une retraitée avec laquelle il venait de s'entretenir, oubliant que son micro était resté ouvert, avant de devoir s'excuser platement.

«Ce travail implique de faire beaucoup de choses et, comme on l'a vu hier, je ne les réussis pas toutes», a-t-il reconnu dans son propos initial. «Mais je sais vraiment comment diriger l'économie, dans les bonnes périodes comme dans les mauvaises».

Devancé dans les sondages, le Premier ministre jouait son va-tout. Il a tenté de faire valoir son bilan au coeur de la crise, lui dont l'action avait été louée à l'étranger.

«Lorsque les banques se sont écroulées, j'ai pris immédiatement des mesures. (...) pour éviter que la récession ne se transforme en dépression», a-t-il rappelé.

Sur la question du déficit public, il a accusé M. Cameron de remettre en cause la timide reprise de l'économie (+0,2% seulement au premier trimestre) en voulant réduire dès cette année les dépenses publiques.

«S'il vous plaît, ne faisons pas les erreurs des années 30, des années 80 et des années 90 et soutenons l'économie jusqu'à ce que la reprise soit garantie», a-t-il martelé.

Très combatif, M. Cameron a pour sa part estimé que l'économie britannique était «dans l'ornière». «Nous avons besoin de changement pour qu'elle reparte», a-t-il asséné, s'en prenant à un M. Brown «usé» et «désespéré».

Nick Clegg, très populaire depuis les deux premiers débats, a cette fois-ci peiné à se différencier de ses opposants, semblant moins à l'aise sur les questions économiques.

Il a retrouvé son assurance quand le débat s'est déplacé sur le terrain de l'immigration, qui a donné lieu à de vifs échanges.

Il a défendu sans se laisser démonter son projet de régularisation des étrangers en situation irrégulière présents dans le pays depuis au moins dix ans et parfaitement intégrés.

Dans sa déclaration finale, M. Brown a mis en garde contre le danger de laisser MM. Cameron et Clegg «mettre en oeuvre leurs politiques dangereuses». «Ils ne sont pas prêts à gouverner, parce que leurs programmes ne sont pas assez aboutis», a-t-il plaidé.

Avec le Labour ce sera «encore la même chose», avec les Lib Dems vous aurez «l'incertitude», a quant à lui lancé M. Cameron aux électeurs.

Ce dernier débat devrait renforcer ses chances de ramener les Tories au pouvoir après 13 ans d'opposition, même si les sondages privilégient l'hypothèse d'un Parlement sans majorité absolue.