Dominique de Villepin a annoncé jeudi sa décision de créer «un mouvement politique libre et indépendant», se livrant à une sévère critique des trois années de présidence de Nicolas Sarkozy et appelant à un «changement de politique», avec 2012 en ligne de mire.

Ce nouveau mouvement politique sera officiellement fondé le 19 juin, date à laquelle son nom sera annoncé, a-t-il précisé lors d'une conférence de presse hautement médiatisée à Paris.

Prononçant un discours de plus de trente minute devant la foule des journalistes, M. Villepin s'est ouvertement posé en présidentiable. «L'élection n'est pas une affaire d'expérience. C'est une affaire de vision, d'ambition, non pas pour soi, mais pour la France», a-t-il affirmé.

Pointant du doigt la défaite de la droite aux élections régionales, l'ancien Premier ministre a dit avoir «entendu le message des Français», de «défiance», «d'exaspération» et «de sanction» vis-à-vis de l'UMP. «Pour moi, c'est l'échec d'une stratégie et c'est l'échec d'une politique», a-t-il jugé.

Sans jamais citer le nom de Nicolas Sarkozy, il a dénoncé une «politique de dispersion, de réformes tous azimuts, incapable de choisir ses cibles et qui au bout du compte était peu visible, n'emportait pas l'adhésion des Français et n'avait pas l'efficacité escomptée».

«Je suis mal à l'aise dans la politique qui est menée aujourd'hui par la majorité», a-t-il lâché, avant de livrer une salve de critiques contre le gouvernement.

Evoquant le débat sur la burqa, il s'est interrogé pour savoir si «nous n'avons pas dans nos outils législatifs, réglementaires, les moyens d'apporter une juste réponse, mesurée, sans rechercher de bouc-émissaires, sans diviser les Français, sans montrer du doigt telle ou telle communauté?». «Le débat sur l'identité nationale a montré qu'on pouvait jouer sur tout», a-t-il encore estimé.

Proposant une série de «pistes» de réformes, avec en ligne de mire l'élection présidentielle de 2012, M. Villepin a expliqué ne pas être «là pour défendre une ambition personnelle», mais «pour défendre une vision, un projet et une conviction pour la France».

«Le mot d'ordre de mon combat, c'est une République solidaire», a-t-il résumé, réclamant la «justice sociale» et la «justice salariale». «Il faut suspendre le bouclier fiscal», a-t-il notamment réclamé.

«Bien sûr ce n'est pas l'heure des déclarations de candidatures, mais quand on présente un projet aux Français et pour notre pays il ne s'agit pas évidement de préparer les cantonales de 2011», a commenté le député villepiniste François Goulard sur RTL.

Hervé Mariton estime qu'il s'agit pour M. Villepin d'«une manière plus organisée, plus structurée, de stimuler le débat de fond qu'il porte d'assez belle manière».

«Est-ce qu'une oeuvre politique concourt à la préparation des présidentielles, évidemment, ça me paraît indispensable à la majorité. On a manifestement besoin d'émulation et de stimulation dans le débat des idées», a expliqué le député villepiniste dans le Talk Orange-Le Figaro, précisant que le Club Villepin compte «un peu plus de 15 000 adhérents».

Le porte-parole adjoint de l'UMP, Dominique Paillé, a estimé sur LCI que «la logique comportementale de Dominique de Villepin depuis plusieurs mois» le conduit à créer «ce parti politique pour satisfaire ses ambitions personnelles, vraisemblablement».

Et de s'interroger sur les objectifs de l'ancien Premier ministre. «Veut-il être un plus pour le camp qui l'a toujours soutenu, même dans les moments difficiles, comme celui du CPE, ou veut-il tout simplement diviser un peu plus la famille politique qui l'a pourtant porté très longtemps et dans des conditions difficiles lorsqu'il était à Matignon?».

«On peut dire que Dominique de Villepin a le courage d'affirmer une position assez nette de rupture avec la rupture prônée par Nicolas Sarkozy», a estimé de son côté la socialiste Aurélie Filippetti sur LCI. «Quand j'entends le réquisitoire implacable fait par Dominique de Villepin contre la politique de Nicolas Sarkozy, je me dis qu'il aurait dû (appliquer) ces méthodes et ces principes au moment où lui-même était au pouvoir».

Le collectif Banlieues Respect affirme dans un communiqué qu'il «partage entièrement l'analyse de Dominique de Villepin, concernant les différents plans banlieues conçus au sommet de l'Etat, déversant des centaines de millions d'euros sur le terrain sans obtenir quelques années plus tard les résultats espérés».