Après Tony Blair, c'était au tour de l'actuel premier ministre britannique d'être interrogé, hier, sur son rôle dans la guerre en Irak. Contrairement à son prédécesseur, Gordon Brown avait beaucoup à perdre dans cette audience, à quelques mois des élections législatives. Ministre des Finances de 1997 à 2007, il a été accusé d'avoir mis en péril la vie de militaires mal équipés.

C'est un Gordon Brown posé, souriant et compatissant qui s'est présenté à la commission d'enquête sur l'Irak, hier. Celui qui signait les chèques au ministère de la Défense durant l'occupation s'est cependant défendu d'avoir privé les soldats d'équipements sécuritaires par souci d'économie.

 

D'entrée de jeu, le commissaire John Chilcot lui a demandé de se prononcer sur une guerre sur laquelle il s'était rarement exprimé. «C'était la bonne décision (d'envahir l'Irak) et pour de bonnes raisons», a-t-il répondu.

Le premier ministre s'est immédiatement démarqué de Tony Blair en rendant hommage aux soldats morts au combat, ce que son ancien patron s'était refusé à faire en janvier. «Nous savons aussi qu'il y a eu beaucoup de civils irakiens tués, et toute perte de vie nous rend très tristes», a-t-il déclaré au début de la journée.

Gordon Brown, qui avait voté en faveur de l'invasion le 18 mars 2003, a mollement défendu la nécessité d'aller en guerre contre Saddam Hussein. Il a répété que des «leçons importantes» avaient été apprises en Irak et a souhaité que les institutions internationales comme l'ONU aient plus de pouvoir à l'avenir.

Mais la question cruciale à laquelle il devait répondre était celle-ci: a-t-il alloué assez d'argent aux forces armées lorsqu'il était ministre des Finances?

Des proches de soldats morts et un ancien général, Lord Guthrie, l'ont blâmé cette semaine pour avoir pourvu l'armée de véhicules de guerre défaillants. Une quarantaine de militaires sont morts à bord de camionnettes non blindées de marque Land Rover Snatch en Irak et en Afghanistan depuis 2005.

«Aucune des requêtes de l'armée n'a jamais été refusée, a-t-il insisté. Concernant les Land Rover, dès que le ministère de la Défense nous a demandé 90 millions de livres sterling pour les remplacer, nous avons obtempéré.»

La décision du premier ministre de lancer cette enquête indépendante sur l'Irak paraît maladroite aujourd'hui.

À seulement quelques mois d'élections générales, pressenties en mai, les électeurs replongent dans les souvenirs douloureux d'une guerre orchestrée par le Parti travailliste, au pouvoir.

Brown peut dormir tranquille, croient la plupart des observateurs. «Il a offert une performance impressionnante qui pourrait lui faire gagner quelques votes», a soutenu le chroniqueur du Guardian Michael White.