La Libye a décidé d'imposer un embargo économique «total» sur la Suisse dans la foulée de la crise diplomatique entre les deux pays, a déclaré mercredi à l'AFP le porte-parole du gouvernement libyen, Mohamed Baayou.

«La Libye a décidé d'imposer un embargo total sur tous les échanges économiques et commerciaux avec la Suisse», a indiqué M. Baayou.

Elle a décidé par ailleurs d'«adopter d'autres alternatives en ce qui concerne les médicaments et les équipements médicaux et industriels» suisses importés par Tripoli, a-t-il précisé.

Les relations entre Berne et Tripoli sont en crise depuis l'interpellation musclée, en juillet 2008 à Genève, d'un des fils du colonel Kadhafi, Hannibal, sur plainte de deux domestiques l'accusant de mauvais traitements.

La Libye avait déjà pris en 2008 des mesures de rétorsion à l'encontre de la Suisse, retirant ses avoirs des banques suisses, et expulsant les sociétés helvétiques installées en Libye, outre l'annonce de l'arrêt de ses exportations de pétrole vers la Confédération.

Berne avait répondu par l'adoption d'une politique restrictive de visas Schengen envers les ressortissants libyens.

Cette mesure avait provoqué la colère de la Libye qui a décidé le 14 février de faire de même avec les Européens, provoquant l'intervention des capitales européennes dans le conflit.

Les exportations suisses vers la Libye sont marginales au regard de ses relations commerciales avec d'autres pays, notamment européens. Elles se sont élevées en 2009 à 156 millions de francs suisses (106 millions d'euros) alors que la Suisse a exporté au total des marchandises pour une valeur de 180,3 milliards de francs (122,6 milliards d'euros).

Les échanges commerciaux entre les deux pays ont d'ailleurs fortement ralenti à la suite de la crise: les achats de pétrole à la Libye se sont ainsi effondrés de 80% en 2009 par rapport à l'année précédente, selon l'administration fédérale des douanes.

Signe de ce refroidissement des relations sur le plan commercial, les exportations suisses vers la Libye ont chuté de 44,7% en 2009 par rapport à 2008, et les importations de produits libyens en Suisse ont baissé de 78,4% à 718 millions de francs suisses (488 millions d'euros), selon les statistiques des douanes helvétiques.

Autre manifestation de la crise entre les deux pays, les autorités libyennes avaient arrêté en juillet 2008 deux hommes d'affaires suisses, Rachid Hamdani et Max Göldi, qui ont été jugés pour «séjour illégal» et «exercice d'activités économiques illégales».

Si le premier a pu quitter la Libye le 23 février après avoir été blanchi, le second purge une peine de quatre mois de prison.

Pour résoudre la crise, la Libye exige un arbitrage international dans l'«affaire Hannibal» et le jugement des responsables de l'arrestation musclée d'Hannibal Kadhafi, a rappelé mardi le ministre libyen des Affaires étrangères, Moussa Koussa.

L'interdiction de la construction de minarets en Suisse approuvée fin novembre par référendum à près de 60% dans la confédération helvétique a également envenimé la crise.

Le numéro un libyen Mouammar Kadhafi avait appelé jeudi les musulmans à mener le «jihad» contre la Suisse, qualifiée de «mécréante et apostate», et au boycott de son économie en réponse à cette interdiction.