Le Premier ministre ukrainien Ioulia Timochenko a renoncé samedi à contester en justice la victoire à la présidentielle de son rival pro-russe, Viktor Ianoukovitch, ouvrant la voie à son investiture à la présidence.

Le chef du gouvernement a créé la surprise samedi en retirant au deuxième jour d'audience son recours visant à invalider l'élection de M. Ianoukovitch, arguant de la partialité de la Cour administrative suprême.

«De facto, (les juges) ont refusé d'étudier les preuves», a accusé Mme Timochenko, qui faisait état de fraudes massives en faveur de son adversaire, bien que les observateurs internationaux aient jugé le scrutin démocratique.

«Il est évident que ceci (...) n'est pas la justice», a-t-elle poursuivi, dénonçant «l'impossibilité de défendre ses droits au tribunal», avant de quitter la Cour par une porte de service pour échapper à la foule réunie devant le bâtiment.

Après plus de cinq heures de délibérations, le collège d'une cinquantaine de juges a accepté le retrait du recours, tout en rejetant les accusations de partialité.

La Cour a décidé de «satisfaire la requête» de Mme Timochenko et de «ne pas examiner» son recours demandant l'annulation des résultats du scrutin et l'organisation d'un nouveau deuxième tour, a annoncé le juge chargé du dossier, Olexandre Netchytaïlo, mettant un terme au procès.

Mme Timochenko, devancée d'environ 900.000 suffrages par son adversaire, a par ailleurs indiqué aux journalistes qu'elle ne comptait pas entamer de poursuites devant la Cour suprême, mais elle n'a pas pour autant reconnu sa défaite.

Le Parti des régions de M. Ianoukovitch n'a pour sa part pas caché sa satisfaction : «Le point final a été mis aux tentatives de modifier le résultat de la présidentielle», a noté le vice-président du Parlement, Olexandre Lavrinovitch, qui représentait M. Ianoukovitch au tribunal.

«Il ne reste plus rien d'autre à faire que de nous préparer pour le 25 février, jour où le nouveau président prêtera serment», s'est-il félicité, selon l'agence Interfax.

Ce haut responsable a aussi estimé que Mme Timochenko avait fait volte-face afin d'éviter l'humiliation d'une décision de justice lui étant défavorable.

«L'état émotionnel de Timochenko ne lui permet pas de reconnaître (directement) se défaite. Mais elle l'a fait de façon originale pour ne pas avoir à attendre ce que dira le tribunal», a-t-il ironisé.

Si l'avenir politique de Mme Timochenko est incertain, elle peut encore s'avérer encombrante pour M. Ianoukovitch. Le Parti des régions a en effet déposé au Parlement une motion de censure visant le gouvernement, mais son adoption n'est pas garantie.

Viktor Ianoukovitch deviendra jeudi le quatrième président ukrainien depuis l'indépendance du pays en 1991, succédant au pro-occidental Viktor Iouchtchenko, qui cinq ans plus tôt l'avait privé de la magistrature suprême.

Sa «victoire» électorale avait en effet été annulée pour fraudes sous la pression d'un soulèvement populaire pacifique et pro-occidental, baptisé la Révolution orange, qui porta au pouvoir M. Iouchtchenko.

Ce dernier, qui entretient de très mauvais rapports avec les deux finalistes de la présidentielle, a néanmoins téléphoné M. Ianoukovitch pour le féliciter de sa «victoire légitime».

Le président élu s'est aussi entretenu samedi avec le chef de l'Etat russe Dmitri Medvedev, et selon le Kremlin, cité par les agences russes, les deux hommes se rencontreront début mars à Moscou.

Les relations russo-ukrainiennes se sont considérablement dégradées depuis la Révolution orange, en raison des aspirations à rejoindre l'Otan de Viktor Iouchtchenko.