La France enverra quelque 80 instructeurs militaires de plus en Afghanistan, a annoncé vendredi le ministre français de la Défense Hervé Morin, bien loin des besoins définis par les États-Unis, qui plaident pour l'envoi de milliers de formateurs.

«J'ai indiqué que compte tenu des besoins considérables en matière de formation, la France mettrait des moyens supplémentaires pour la montée en puissance de la nouvelle école de blindés et de cavalerie à laquelle nous coopérons avec les Allemands, comme pour le centre logistique» en Afghanistan, a déclaré M. Morin à la presse, au cours d'une réunion de l'OTAN à Istanbul.

«Nous enverrons aussi une équipe supplémentaire d'instructeurs dans la zone de responsabilité française (est de l'Afghanistan) pour encadrer le dernier bataillon afghan» à ne pas bénéficier encore d'un encadrement français, a-t-il dit.

Cela fera au total «moins d'une centaine d'instructeurs, 70 à 80 selon nos premières estimations, qui seront envoyés dans les mois qui viennent, pour le printemps», portant les effectifs déployés par la France sur le théâtre afghan à «3800 ou 3850», a ajouté le ministre.

Cette annonce est conforme aux déclarations du président Nicolas Sarkozy sur le fait que la France n'enverrait pas de troupes combattantes.

Elle n'en contraste pas moins avec les renforts annoncés par des pays de l'OTAN comparables comme l'Italie (1000), le Royaume-Uni (500) et l'Allemagne (500 plus 350 en réserve), depuis que les États-Unis ont eux-mêmes annoncé l'envoi de 30 000 soldats en renfort.

M. Morin a tenu néanmoins à rappeler l'ampleur de la contribution française en matière de formation.

«Notre effort passera de six à sept OMLT», a précisé le ministre. Cinq exercent dans la zone sous responsabilité française des districts de Surobi et de Kapisa (est) et les deux autres (dont l'un à titre temporaire) dans le sud.

La France participe par ailleurs depuis des années à la formation d'officiers afghans et a décidé récemment de doubler de 20 à 40 millions d'euros le montant de sa coopération civile, a souligné le ministre.

Paris a aussi déployé 150 gendarmes à Kaboul, avec une mission de formation.

M. Morin a redit son approbation de la nouvelle stratégie mise en oeuvre par le commandant en chef de la Force internationale (Isaf), le général Stanley McChrystal, qui passe par le transfert progressif à l'armée et à la police afghanes de la responsabilité d'assurer la sécurité en première ligne.

«La stratégie de McChrystal correspond parfaitement à nos voeux», a-t-il souligné. «Pas de solution militaire, mais d'abord une solution politique».

L'armée gouvernementale afghane, forte de près de 100 000 soldats, doit passer à 134 000 en octobre 2010, puis à 171 000 un an plus tard.

«Au fur et à mesure que l'armée afghane montera en puissance, nous pourrons nous désengager», a souligné le ministre français.

Avant la réunion des ministres de la Défense de l'OTAN, un haut responsable américain avait cependant estimé qu'il manquait 1500 à 1700 instructeurs pour entraîner la police et l'armée afghanes, ainsi que quelque 2500 hommes pour les OMLT chargées de suivre et d'encadrer les forces afghanes sur le terrain.

La délégation américaine accompagnant le secrétaire à la Défense Robert Gates à Istanbul a indiqué n'avoir pas été informée de la décision de la France.

«Rien ne nous a été communiqué, sauf une volonté générale d'envoyer plus d'instructeurs», a commenté un responsable américain sous couvert de l'anonymat.

M. Gates devait être reçu lundi par MM. Morin et Sarkozy.