Les Ukrainiens votaient dimanche pour élire leur futur président et donner un nouveau cap au pays, le héros de la Révolution orange pro-occidentale de 2004, Viktor Iouchtchenko, n'ayant guère de chances d'être réélu dans un profond climat de désillusion.

Deux grands rivaux sont en lice: Viktor Ianoukovitch, traditionnellement plus proche de Moscou et favori des sondages, et le premier ministre Ioulia Timochenko, égérie de la Révolution orange, jugée plus pro-européenne même si elle entend ménager la Russie.

Aucun des deux ne semble en position de l'emporter dès dimanche, en raison de la pléthore de candidats - 18 au total - et du morcellement de l'électorat dans ce pays de 46 millions d'habitants, laissant d'ores et déjà entrevoir un deuxième tour le 7 février.

Selon une enquête de l'Institut de sociologie international de Kiev (KIIS) réalisée début janvier, M. Ianoukovitch recueillerait 39% des voix au premier tour et Mme Timochenko 23%.

Une surprise n'est toutefois pas à exclure totalement de la part de candidats moins en vue comme l'ex-banquier Sergui Tiguipko (12%), qui pourrait inquiéter Mme Timochenko.

En revanche, les jeux semblent bel et bien faits pour Viktor Iouchtchenko, qui a profondément déçu ses compatriotes, notamment dans la lutte contre la corruption, le tout sur de fond de crises politiques à répétition et de vives tensions avec Moscou.

À Kiev, les premiers électeurs ont dû braver un froid mordant pour aller voter: les premiers chiffres de participation à 04H00 HNE montraient un résultat légèrement en retrait par rapport à 2004, à 15,1%. Les premiers sondages de sortie des bureaux de vote sont attendus dès la clôture du scrutin à 20H00.

Mme Timochenko a elle-même voté à Dniepropretovsk (est): «Aujourd'hui, il ne s'agit pas seulement de choisir un candidat: l'Ukraine choisit son avenir pour des dizaines d'années», a lancé la candidate.

«J'ai le sentiment que le peuple ukrainien veut du changement, et très bientôt une nouvelle étape de la vie du pays va commencer» a déclaré de son côté son principal concurrent Ianoukovitch, qui faisait de même à Kiev.

À Donetsk (est), bastion de M. Ianoukovitch, nombre de citoyens géorgiens se présentant comme des journalistes étaient présents dans les bureaux de vote dimanche, a constaté l'AFP.

La veille, les autorités locales avaient accusé des centaines de Géorgiens arrivés de Tbilissi de fomenter des troubles au profit de Mme Timochenko. Deux journalistes géorgiens de la chaîne Imedi ont par ailleurs indiqué avoir été agressés dans la nuit par des inconnus.

D'autres incidents mineurs ont été signalés par les médias en province comme un manque d'urnes et des incohérences dans les listes électorales à Odessa (sud). À Donetsk, un bureau a dû retarder son ouverture après que la présidente du bureau ait apposé un tampon erroné sur 600 bulletins de vote.

Mais le président de la Commission électorale centrale, Vladimir Chapoval, s'est voulu rassurant, indiquant qu'aucun incident sérieux n'avait été détecté pour le moment.

Le thème des fraudes est éminemment sensible en Ukraine depuis que la justice a invalidé la victoire de M. Ianoukovitch pour cette raison à la présidentielle de 2004, ouvrant la voie à l'arrivée au pouvoir de M. Iouchtchenko.

Quel que soit le vainqueur cette fois, il n'aura pas la partie facile pour relever un pays en mal de stabilité politique et économiquement presque en faillite: il est depuis plus d'un an sous perfusion financière du Fonds monétaire international.