Le premier ministre d'Irlande du nord depuis 18 mois, Peter Robinson -sexagénaire protestant dont la survie politique est menacée par un scandale impliquant son épouse- est considéré par Londres et Dublin comme un modéré à même de composer avec l'ex-ennemi catholique.

M. Robinson a fait sensation lundi en décidant de mettre son mandat entre parenthèses, six semaines durant, le temps de prouver son innocence dans l'affaire déclenchée par son épouse Iris. Il doit faire la preuve qu'il ignorait tout des malversations de sa femme, qui a aidé financièrement dans des conditions litigieuses un jeune homme, de 39 ans son cadet, avec lequel elle a eu une liaison extraconjugale. Peter Robinson, 61 ans, est resté 28 ans dans l'ombre du révérend Ian Paisley, le fondateur du Parti unioniste démocrate (DUP), qui a été pendant un demi-siècle l'avocat d'un protestantisme intransigeant surnommé «Docteur No», avant d'accepter en mai 2007 de partager le pouvoir avec les catholiques.

En juin 2008, Peter Robinson a succédé au révérend Paisley à la tête du parti et au poste de premier ministre conduisant un gouvernement régional de coalition avec les catholiques du Sinn Féin.

Son mandat a cependant été marqué par son incapacité à mettre en oeuvre la dévolution des pouvoirs de police et de justice de Londres vers Belfast, faute d'accord avec son vice-premier ministre, le catholique Martin McGuinness sur un calendrier et les modalités du transfert.

Malgré les tensions créées par la recrudescence des violences imputées aux groupes républicains dissidents, les deux hommes n'ont cependant jamais rompu le dialogue. Peter Robinson avait déjà fait la preuve de son habileté et de son sens du consensus au ministère des Finances en 2007-2008.

Peu porté aux outrances verbales du révérend Paisley, il a accompagné l'aggiornamento du DUP.

Né le 29 décembre 1948 à Craigantlet Hills, en périphérie de Belfast, Peter Robinson a été la cheville ouvrière du DUP dès sa fondation en 1971. Le parti claironnait alors sa haine viscérale des catholiques, défendant l'union avec la Grande-Bretagne.

Ancien agent immobilier, il devient numéro deux en 1980. En 1985, il renonce temporairement au siège de député au parlement de Westminster qu'il détient depuis 1979, pour dénoncer la signature d'un accord anglo-irlandais qui accorde un droit de regard à Dublin sur l'Irlande du Nord.

Son opposition prend un tour plus audacieux en 1986, quand il pénètre à la tête de 500 loyalistes dans le village de Clontibret, en République d'Irlande, pour démontrer les failles de la sécurité à la frontière. Il est photographié quelques semaines plus tard en tenue de paramilitaire.

Comme son parti, il rejette l'accord de paix du Vendredi saint d'avril 1998. En 1999, il accepte de devenir ministre du Développement régional dans le nouveau gouvernement, mais n'assiste pas aux réunions du cabinet.

Il démissionne plusieurs fois pendant cette période d'incertitude permanente. La province lui doit toutefois la mesure la plus significative d'alors: la gratuité des transports publics pour les personnes âgées.

Aux élections de novembre 2003, le DUP devient le premier parti d'Ulster.

En habile débatteur, il joue un rôle influent dans les négociations menant à l'accord de Saint-Andrews en octobre 2006, qui débouche sur la formation du nouveau gouvernement d'union en mai 2007.

Père de trois enfants, Peter Robinson va maintenant s'efforcer de retisser les liens avec son épouse Iris, qui avait tenté de se suicider au début 2009 après lui avoir révélé sa liaison et souffre depuis de dépression.