Deux immigrés ont été blessés par balles aux jambes vendredi soir à Rosarno en Calabre (sud de l'Italie), où la police a envoyé des renforts au vu des tensions persistantes, après des manifestations d'immigrés qui avaient dégénéré la veille en affrontements avec les forces de l'ordre.

Un «important contingent de policiers a été envoyé pour assurer un meilleur contrôle du territoire et garantir la sérénité à toute la population présente», a annoncé le chef de la police Antonio Manganelli, après s'être entretenu avec le ministre de l'Intérieur Roberto Maroni. Les deux blessés, victimes de tirs de fusils de chasse et souffrant de blessures «sans gravité» selon la police, ont été admis à l'hôpital de Polistena.

Selon un carabinier de Gioia Tauro, qui supervise la région où se trouve la localité de Rosarno, les deux hommes ont été atteints alors qu'ils se trouvaient sur la route. Ils vivaient dans une ferme abandonnée près de Rosarno.

La situation était toujours «tendue» vendredi soir dans la zone avec «des manifestations d'habitants contre les immigrés et d'immigrés contre les habitants», a précisé ce carabinier, joint par téléphone par l'AFP depuis Rome.

Selon l'agence italienne Ansa, une centaine d'habitants armés de bâtons et de barres de fer ont érigé vendredi soir à proximité de Rosarno une barricade près d'un local où se trouvent de nombreux immigrés.

Jeudi soir, plusieurs centaines d'ouvriers agricoles, pour la plupart employés illégalement dans la région et provenant d'Afrique noire, avaient incendié des voitures et brisé des vitrines à coups de bâtons à Rosarno pour protester contre l'agression de plusieurs d'entre eux, cible de tirs de fusils à air comprimé.

Des incidents s'en étaient suivis, faisant plusieurs blessés parmi les manifestants.

Après ces affrontements, le HCR s'était dit très préoccupé d'un risque de «chasse aux immigrés».

«Nous sommes très préoccupés face à la situation à Rosarno et à la tension qui reste forte aujourd'hui», avait déclaré un peu plus tôt vendredi à l'AFP la porte-parole de l'antenne italienne du Haut commissariat de l'ONU pour les réfugiés, Laura Boldrini.

Annonçant une mission du HCR sur place dès samedi, elle a dit s'inquiéter du «risque que des habitants cherchent à se venger».

«On ne sait pas avec certitude mais deux ou peut-être cinq ont été blessés et hospitalisés» après les manifestations, a dit Mme Boldrini.

Vendredi, un sit-in a réuni environ 2.000 immigrés dans le centre de Rosarno, selon les médias italiens, tandis qu'une dizaine d'habitants bloquaient des voies d'accès et d'autres occupaient la mairie pour demander d'éloigner les immigrés de la ville.

M. Maroni, membre du parti anti-immigrés Ligue du nord, a affirmé que ces tensions étaient le résultat d'«une trop grande tolérance face à l'immigration clandestine».

Mme Boldrini, tout comme le principal syndicat italien Cgil, ont dénoncé les «conditions inhumaines dans lesquelles vivent ces ouvriers: cabanes insalubres, sans eau, sans hygiène».

Selon la Cgil, environ 50.000 travailleurs immigrés vivent en Italie dans des logements insalubres similaires à ceux de Rosarno.

Elle a dénoncé l'emprise de la mafia surtout dans le sud du pays sur ces immigrés massivement employés dans l'agriculture, qui représentent «une main d'oeuvre à bas coût» payée autour de 25 euros par jour.