Jean Paul II fait un pas sur le chemin de la sainteté. Le pape Benoît XVI a signé samedi un décret attestant des vertus héroïques de son prédécesseur, un préalable à la béatification.

Le père Popieluszko, mais aussi le controversé pape Pie XII, ont également avancé vers le statut de «bienheureux», étape vers la canonisation.

Benoît XVI a ainsi reconnu l'héroïcité des vertus du pape Pie XII mort en 1958, malgré l'opposition d'organisations juives qui lui reprochent son silence sur l'Holocauste pendant la Seconde guerre mondiale. Des dirigeants de la communauté juive d'Italie, qui doivent accueillir Benoît XVI à la synagogue de Rome le 17 janvier, ont de fait critiqué sa décision, déclarant dans un communiqué conjoint qu'ils n'oublieraient jamais la déportation de Juifs italiens -dont 1.021 personnes le 16 octobre 1943 à bord d'un train ôôqui a quitté la gare ferroviaire Tiburtina à Rome pour Auschwitz dans le silence de Pie XII».

De son côté, le ministère israélien des Affaires étrangères a jugé comme d'autres la décision du pape prématurée: les actions de Pie XII doivent faire l'objet d'un «examen historique approfondi», a-t-il fait valoir. «L'histoire sera juge».

Benoît XVI a également proclamé martyr de la foi le père Jerzy Popieluszko, ce jeune prêtre enlevé et assassiné en 1984 en Pologne par la police secrète communiste. Cette désignation signifie que l'aumônier de Solidarnosc pourra être béatifié sans qu'un miracle eut été attesté.

Enfin, le souverain pontife a approuvé un second miracle attribué à Mère Mary Mackillop, morte en 1909, qui pourrait ainsi devenir la première sainte de l'Australie.

Après la reconnaissance de l'héroïcité de ses vertus, Jean Paul II peut être déclaré «Vénérable». Il faut désormais qu'un miracle dû à son intercession soit reconnu pour qu'il puisse être proclamé Bienheureux, étape intermédiaire avant la canonisation. Aucune date n'a encore été annoncée pour cette cérémonie, mais les médias italiens croyaient savoir que Jean Paul II pourrait être béatifié dès octobre prochain. Pour la canonisation, un second miracle attribué au défunt pape devra être attesté.

Dès la mort et les funérailles du pape polonais, en 2005, s'étaient élevés les cris de «santo subito», réclamant la canonisation rapide de ce pape extrêmement populaire. Et en effet, la procédure a depuis été engagée à un rythme rapide qui pourrait voir Karol Wojtyla canonisé quelques années seulement après sa mort.

Un mois après son décès, en mai 2005, le nouveau pape et ancien cardinal Joseph Ratzinger avait entamé cette procédure en accéléré, en annonçant la dispense du délai des cinq années après le décès habituellement respecté avant le début de l'examen du dossier. Seule Mère Teresa, la religieuse de Calcutta morte en 1997 et béatifiée en 2003 par Jean Paul II, avait jusque-là bénéficié d'une telle dispense. Dans le même temps, le Saint Siège a insisté pour suivre à la lettre toute la complexe procédure vers la canonisation.

Il y a quelques semaines, la Congrégation pour la cause des saints a approuvé l'héroïcité des vertus de Jean Paul II après qu'un panel de théologiens, cardinaux et évêques eurent examiné l'épais dossier sur la vie du défunt pape et conclu qu'il méritait de figurer sur la liste des candidats.

Une commission de médecins, prélats et autres experts doit maintenant reconnaître un miracle pour que Benoît XVI puisse élever Jean Paul II au rang de bienheureux. Ce miracle présumé nécessaire à la béatification a déjà été identifié: il s'agit de la guérison inexpliquée d'une religieuse française atteinte de la maladie de Parkinson, soeur Marie-Simon-Pierre, qui avait prié Jean Paul II et s'est réveillée apparemment guérie, deux mois après la mort du pape polonais, qui souffrait lui aussi de cette affection dégénérative.

Le cardinal Stanislaw Dziwisz, qui fut le secrétaire particulier de Jean Paul II et occupe désormais la tête de son ancien diocèse de Cracovie, n'a pas exclu une canonisation avant le cinquième anniversaire du décès du pape polonais.

Avant de signer les décrets samedi, Benoît XVI a rencontré les membres de la Congrégation pour la cause des saints, saluant leur travail qui permet, a-t-il dit, de donner aux fidèles des modèles de foi. «Chaque béatification et canonisation constitue pour les Chrétiens un fort encouragement» à suivre avec intensité la voie du Christ vers «la plénitude de l'existence chrétienne et la perfection de la charité», a-t-il souligné.