«L'art de la guerre, c'est de soumettre l'ennemi sans combat», écrivait le général chinois Sun Tzu. Un principe que l'armée britannique semble avoir fait sien. Cette dernière paie les hommes afghans pour ne pas qu'ils se joignent aux talibans. Les soldats canadiens ont-ils eu recours à ces méthodes?

À la guerre comme à la guerre. En Afghanistan, tous les moyens sont bons pour contrer l'ennemi taliban. Telle semble être la stratégie du ministère britannique de la Défense. Dans un récent manuel, celui-ci recommande à ses nouveaux soldats de donner «des sacs d'or» aux Afghans susceptibles de rallier le camp taliban.

La somme offerte: plus de 10$ par jour. Une somme plus élevée que le salaire proposé par les talibans et cinq fois supérieure au revenu moyen de la population.

Une manière de «soudoyer» les Afghans? Le ministère britannique s'en défend. «L'idée que nous achetons les talibans est complètement fausse», s'est justifié la semaine dernière son porte-parole. Ce dernier a tenu à préciser que le manuel «fournit des instructions sur l'importance de financer des projets de reconstruction et de développement qui ont rapidement un impact, et qui fournissent des résultats rapides pour gagner la confiance des populations locales».

Il y a les manuels d'un côté, les pratiques de l'autre. Car si les codes de conduite des armées ne préconisent pas les dessous-de-table, dans les faits, la pratique existe.

Le mois dernier, le quotidien britannique The Times rapportait que les services secrets italiens ont payé des commandants talibans et des seigneurs de guerre au cours de l'année 2008. Ils leur auraient offert plusieurs dizaines de milliers de dollars pour que ces derniers sécurisent Sarobi, une zone située à l'est de Kaboul.

À leur arrivée, les soldats français ont repris le contrôle de cette zone alors qu'ils ignoraient tout de ces versements secrets. Résultat: ils se sont lancés dans une opération périlleuse qui a causé la mort de 10 d'entre eux.

Selon Terry Liston, major-général retraité des Forces armées canadiennes, cette pratique est courante: «En 2001, lorsque les forces spéciales de l'armée américaine sont arrivées en Afghanistan, il n'y avait pas beaucoup de troupes sur le terrain. Les forces spéciales ont payé des seigneurs de guerre afghans pour qu'ils les appuient. C'est la clé du succès, car cela assure aux soldats une sécurité et de l'aide pour les missions sur le terrain.»

Mais rien ne prouve que les Canadiens en aient fait autant. Une chose est sûre: ces derniers ont tenté d'améliorer la situation économique des populations civiles.

«Les Canadiens ont engendré des programmes de développement pour donner du travail aux chômeurs afghans, continue-t-il. Ils ont embauché des gardiens de sécurité à Kaboul et à Kandahar.»

Même son de cloche du côté de Rémi Landry, ancien lieutenant-colonel de l'armée canadienne. Selon le militaire à la retraite qui a séjourné à Kaboul le mois dernier, l'objectif des soldats canadiens est de «contrer le manque de ressources des Afghans». «L'argent est mis de côté pour des travaux communautaires, précise-t-il. Au début, les soldats canadiens ont peut-être acheté de l'information aux Afghans concernant notamment des déplacements de personnes. Ça pourrait être possible.»