La Cour suprême du Brésil a donné son feu vert mercredi à l'extradition vers l'Italie de l'ancien militant d'extrême gauche Cesare Battisti, mais c'est le président Luiz Inacio Lula da Silva qui pourrait être appelé à avoir le dernier mot.

Cinq juges, dont le président de la plus haute juridiction brésilienne Gilmar Mendes, ont voté pour l'extradition de Battisti, 54 ans, et quatre contre. «Certains types de délits, même s'ils ont des objectifs politiques, ne peuvent être considérés comme des crimes politiques. Sinon, on pourrait arriver à avoir des cas de viols, de pédophilie ou de torture traités comme des crimes politiques», a argué le juge Mendes, rejetant le fait que Battisti puisse être considéré comme réfugié politique.

Le Brésil avait accordé en janvier à l'ancien militant le statut de réfugié politique, provoquant une forte tension diplomatique avec Rome.

L'Italie qui réclame Battisti, condamné à perpétuité par contumace pour quatre meurtres commis dans les années 1970, a s'est immédiatement félicitée par la voix du ministre des Affaires étrangères, Franco Frattini, qui a exprimé sa «grande satisfaction».

Battisti, qui nie les meurtres, a entamé une grève de la faim en prison depuis six jours et affirme qu'il «ne retournera pas vivant en Italie».

Jeudi dernier, la Cour divisée avait ajourné son audience, quatre juges étant favorables à l'extradition, quatre y étant opposés et mercredi seul le président de la Cour s'est prononcé.

Néanmoins, en dépit du vote de la Cour, le sort de Battisti n'est pas encore scellé et pourrait encore rester longtemps en prison à Brasilia.

En effet, immédiatement après le jugement, la plus haute instance judiciaire du Brésil a commencé à discuter pour savoir si le président Lula a le pouvoir de s'opposer à l'extradition.

Deux thèses s'affrontent : pour certains juges, la Constitution brésilienne attribue expressément les relations extérieures à l'exécutif, ce qui donne à Lula le dernier mot. Il a déjà fait savoir qu'il était opposé à l'extradition.

Les autres se rangent derrière le juge rapporteur Cezar Peluso pour qui l'existence d'un traité d'extradition entre le Brésil et l'Italie oblige le chef de l'État à respecter la décision de la justice.

De surcroît, avant que l'extradition soit exécutée, Battisti pourrait être jugé au Brésil pour falsification de documents et faux passeport, et purger sa peine dans le pays en cas de condamnation.

L'ancien militant d'extrême gauche s'est réfugié dans les années 1980 en France et s'est enfui au Brésil en août 2004 pour échapper à une extradition vers l'Italie. Arrêté en 2007 à Rio de Janeiro, il est depuis emprisonné à Brasilia.

«Battisti m'a dit: je ne retournerai pas vivant en Italie, je préfère mourir ici», a rapporté mardi son avocat Luis Roberto Barroso, interrogé par l'AFP. Il a ajouté que l'ex-militant «a la conviction absolue que s'il est extradé en Italie, il sera un homme mort».

Maigre et abattu selon des témoins cités par le journal Folha de Sao Paulo, l'ancien militant a reçu mardi le soutien de dix-sept parlementaires dans sa prison. 

Anita Leocadia Prestes, fille de la communiste juive allemande Olga Benario Prestes, remise par le Brésil au régime nazi, a également demandé à Lula d'empêcher «le Brésil de commettre le crime de livrer Cesare Battisti».