C'est une initiative sans précédent. Les familles de deux des dix soldats français tués dans une embuscade tendue par les talibans le 18 août 2008 en Afghanistan, ont décidé de porter plainte devant la justice française, a annoncé leur avocat au journal Le Parisien paru jeudi.

Me Gilbert Collard a précisé à l'AFP qu'il déposerait lundi une plainte contre X pour «mise en danger délibérée de la vie d'autrui» devant le tribunal aux armées de Paris. L'avocat représente les parents du parachutiste Julien Le Pahun, 20 ans, et l'ex-épouse du sergent Rodolphe Penon, 40 ans et père de deux enfants. Ces deux soldats ont été tués avec huit de leurs camarades au cours d'une embuscade tendue par les talibans dans la région de Saroubi, à 50 km à l'est de Kaboul, à peine un mois après avoir pris le contrôle sécuritaire de cette zone pour l'OTAN.

«Nous soupçonnons l'existence d'une série de manquements dans la chaîne de commandement», a déclaré au Parisien Joël Le Pahun, père d'un des deux soldats.

«Nous sommes en droit de connaître la vérité», a-t-il affirmé.

«Cette plainte ne vise pas le président de la République, son gouvernement ou le chef d'état-major des armées», a-t-il ajouté, précisant qu'elle visait «des individus qui n'ont pas (...) assumé leurs responsabilités, qui n'ont pas su gérer la mission qu'ils devaient mettre en place».

«Un haut gradé a lui-même évoqué un «excès de confiance». La justice doit enquêter», a-t-il encore ajouté, rappelant «l'inquiétude» dont lui avait fait part son fils lors de missions où les soldats français étaient particulièrement exposés.

L'annonce de ce dépôt de plainte intervient quinze jours après la publication par le journal britannique The Times d'informations - officiellement démenties - selon lesquelles les services secrets italiens auraient versé de l'argent aux commandants talibans pour se préserver d'attaques dans la région de Saroubi.

Pas informés de ces pratiques, les Français auraient eu une perception sous-évaluée du risque dans la zone, dont ils avaient repris la responsabilité après le départ des Italiens.

Depuis le début de son engagement en Afghanistan en 2001, la France a perdu 36 soldats. Environ 3.000 militaires français y sont actuellement engagés.