Mahinur Ozdemir a créé toute une commotion au parlement régional de Bruxelles lorsqu'elle a prêté serment en juin dernier.

Des dizaines et des dizaines de journalistes venus d'un peu partout étaient présents pour assister à l'entrée en fonction de la jeune députée de 26 ans, qui s'agace de la polémique suscitée dans le pays par le fait qu'elle porte le foulard.

«Je pense qu'on en fait beaucoup trop à ce sujet... En quoi le fait que je cache mes cheveux peut-il causer un problème aux autres?» souligne en entrevue à La Presse la jeune femme, rencontrée dans un café bruxellois.

 

«Si j'enlevais mon foulard, mes idées seraient toujours les mêmes. Et je connais beaucoup de députés qui n'en portent pas et qui défendent des idées beaucoup plus dangereuses que les miennes», souligne Mme Ozdemir, qui s'étonne des réactions de fermeture manifestées par une partie de la classe politique belge.

Mains des hommes

«Certains députés viennent me voir et me demandent si je serre la main des hommes. Ils sont tous étonnés quand je dis que oui. C'est quand même absurde... Il est difficile de faire comprendre aux gens que vous n'êtes pas ce qu'ils pensent», dit la députée.

«Il y a des extrémistes laïques et des extrémistes religieux qui ne veulent pas que les femmes musulmanes prennent leur place dans l'espace public», souligne Mme Ozdemir, qui était récemment au Liban pour recevoir un prix honorifique attribué par une organisation féministe.

La jeune femme, qui est née de parents d'origine turque, a toujours vécu en Belgique. Diplômée de l'Université libre de Bruxelles en sciences politiques, elle a commencé sa carrière politique au niveau local en militant pour un parti centriste qui l'a invitée, en 2005, à se porter candidate aux élections municipales.

«J'ai beaucoup hésité parce que je craignais d'être utilisée politiquement», souligne la députée, qui affirme n'avoir jamais fait du port du foulard un «cheval de bataille».

Réflexion personnelle

Elle dit avoir commencé à porter le foulard à l'âge de 14 ans à l'issue d'une réflexion spirituelle personnelle, et non en réponse à des pressions familiales comme voudraient le faire croire certains de ses critiques.

«Les gens de ma famille m'ont déconseillé de le porter en me disant que ça pouvait me nuire. Ils avaient raison», indique la jeune femme, qui ne voit rien de contradictoire au fait de porter le foulard et d'assumer une charge publique.

«Tout en gardant sa spécificité, on peut faire quelque chose pour l'intérêt général», souligne la députée, qui veut être jugée sur ses idées, non sur sa tenue vestimentaire.

«Il est possible que je décide un jour de retirer le foulard. Mais ce sera parce que j'en ai envie, pas parce qu'on me presse de le faire», dit-elle.