La chancelière allemande Angela Merkel a rendu un hommage plein d'émotion mardi aux victimes de la Seconde guerre mondiale et déclaré que son pays avait provoqué la pire tragédie de l'histoire européenne en déclenchant le conflit le 1er septembre 1939.

«Il y a 70 ans a été ouvert, avec l'attaque allemande contre la Pologne, le chapitre le plus tragique de l'histoire de l'Europe», a déclaré Mme Merkel près de Gdansk dans le nord de la Pologne. Une vingtaine de dirigeants, dont les représentants des anciens belligérants, se sont rendus au pied du monument dédié aux défenseurs polonais de Westerplatte, où le cuirassé allemand Schleswig-Holstein a tiré les premiers coups de canon de la guerre.

«La guerre déclenchée par l'Allemagne a infligé une souffrance incommensurable à de nombreux peuples, des années de privation des droits, d'humiliation et de destruction», a-t-elle dit dans un discours empreint d'émotion.

«Je rends hommage aux 60 millions de personnes qui ont perdu la vie à cause de cette guerre déclenchée par l'Allemagne», a déclaré Mme Merkel.

«Je rends hommage aux six millions de Juifs et à tous les autres qui, dans les camps de concentration et d'extermination allemands, ont subi une mort cruelle», a-t-elle ajouté.

Le souvenir de la Seconde guerre mondiale reste très vivant en Pologne. Entre 5,6 et 5,8 millions de citoyens polonais, soit quelque 17% de la population, dont environ 3 millions de Juifs, ont trouvé la mort durant ce conflit, selon les calculs récents d'historiens polonais.

La chancelière allemande a qualifié de «miracle» la transformation pacifique de l'Europe après la guerre.

«L'Europe (...) s'est transformée d'un continent de terreur et de violence en un continent de liberté et de paix. Que cela ait été possible, ce n'est ni plus ni moins qu'un miracle», a estimé Mme Merkel.

Parmi les dirigeants qui se sont recueillis à Westerplatte étaient également présent les Premiers ministres russe Vladimir Poutine, français François Fillon, italien Silvio Berlusconi et suédois Fredrik Reinfeldt, aussi président en exercice de l'Union européenne.

Les rancoeurs et interprétations divergentes de la Seconde guerre mondiale entre Varsovie et Moscou ont laissé planer une ombre sur ces cérémonies exceptionnelles.

La Pologne demande à la Russie de reconnaître que l'URSS l'a attaquée le 17 septembre 1939 à la suite de l'accord germano-soviétique Ribbentrop-Molotov.

Mardi, le premier ministre russe de Vladimir Poutine a une nouvelle fois rejeté les critiques qui rendent ce pacte responsable de la Seconde guerre mondiale.

«Nous voyons des tentatives persistantes de suggérer que le déclenchement de la Seconde guerre mondiale a été rendu possible exclusivement par le pacte Molotov-Ribbentrop», a déclaré M. Poutine lors d'une conférence de presse conjointe avec le premier ministre polonais Donald Tusk qu'il a rencontré dans la matinée.

Dans son discours prononcé l'après-midi au mémorial de Westerplatte, M. Poutine a estimé que tous les pactes conclus avec l'Allemagne nazie entre 1934 et 1939 étaient «moralement inacceptables», incluant parmi ceux-ci le pacte germano-soviétique signé en août 1939.

«Toutes les tentatives d'apaiser les nazis entre 1934 et 1939 par divers accords et pactes étaient moralement inacceptables et n'avaient aucun sens politique, elle étaient nuisibles et dangereuses», a-t-il déclaré.

Le président polonais Lech Kaczynski a reconnu lors de la même cérémonie que le rôle de la Pologne dans le dépeçage de la Tchécoslovaquie en 1938 fut «une erreur et un péché».

Mme Merkel, tout en admettant qu'on ne pourrait pas «effacer les atrocités de la Seconde Guerre mondiale», a estimé qu'il était à présent du devoir de l'Allemagne «de construire l'avenir tout en étant consciente de (son) éternelle responsabilité».