Deux ex-paramilitaires serbes ont été condamnés l'un à la réclusion à perpétuité, l'autre à 30 ans de prison, lundi à La Haye, pour les meurtres de civils musulmans de Bosnie en 1992, qui relèvent des «actes les plus inhumains qu'une personne puisse infliger à une autre».

«La chambre condamne Milan Lukic à passer le reste de sa vie en prison» pour avoir «tué au moins 132 musulmans», a déclaré Patrick Robinson, juge au Tribunal pénal international (TPI) pour l'ex-Yougoslavie. Son cousin Sredoje Lukic a été condamné à 30 ans d'emprisonnement.

Ils sont «coupables», selon le juge Robinson, de meurtres «sans pitié et haineux» et d'extermination de civils musulmans commis entre 1992 et 1994. Ces crimes contre l'humanité et ces crimes de guerre relèvent des «actes les plus inhumains qu'une personne puisse infliger à une autre», a-t-il souligné.

Milan Lukic, 41 ans, un Serbe de Bosnie qui a fondé la milice paramilitaire des «Aigles blancs» ou «Justiciers» à Visegrad (sud-est de la Bosnie), s'est montré nerveux durant la lecture du jugement, se tortillant sur sa chaise et secouant la tête de gauche à droite en signe de déni. Sredoje Lukic, 48 ans, était un membre de cette milice.

Selon l'accusation, les «Aigles blancs» ont participé, avec la police et les Serbes locaux, à «l'une des campagnes de nettoyage ethnique les plus tristement célèbres du conflit, dont l'objectif était de débarrasser définitivement la ville de toute sa population musulmane» durant la guerre de Bosnie (1992-1995).

Le 14 juin 1992, les deux accusés ont enfermé quelque 70 femmes, enfants et personnes âgées, tous musulmans de Bosnie, dans une maison de Visegrad et en ont tué «au moins 59» en incendiant le bâtiment, selon le tribunal.

Ils ont tiré à l'arme automatique sur ceux qui tentaient de s'enfuir par les fenêtres.

Milan Lukic a également «brûlé vif au moins 60» des 70 musulmans, femmes, enfants et personnes âgées, enfermés le 27 juin 1992 dans une maison de Bikavac, près de Visegrad, où il avait jeté des grenades après avoir condamné toutes les issues. Le tribunal a acquitté Sredoje Lukic pour ces faits en raison de «preuves insuffisantes».

Arrêté en Argentine en août 2005 après cinq ans de cavale, l'ex-chef des «Aigles blancs» a également été reconnu coupable du meurtre par balles de douze civils musulmans et d'une musulmane en juin 1992, des crimes commis «de sang froid et avec indifférence». «Il a ignoré les supplications des victimes pour leur vie», a souligné le TPI.

Sredoje Lukic s'était rendu aux autorités serbes en septembre 2005. A plusieurs reprises, il a brutalisé avec son cousin des Bosniaques musulmans incarcérés dans le camp de détention installé à la caserne d'Uzamnica à Visegrad. «Milan Lukic se rendait uniquement au camp pour maltraiter les détenus», a estimé le juge Robinson.

Les deux accusés plaidaient non coupable et leurs avocats avaient demandé qu'ils soient acquittés. Leur condamnation «reflète la gravité des crimes commis et leur responsabilité», a déclaré à l'AFP Olga Kavran, la porte-parole du procureur Serge Brammertz.

Milan Lukic avait déjà été condamné par contumace à Belgrade à 20 ans de prison pour crimes de guerre, enlèvement, torture et assassinat de 16 Musulmans en octobre 1992 à Sjeverin (Serbie).