Les principales organisations juives en France ont dénoncé dimanche un verdict «indulgent» à l'égard des complices de Youssouf Fofana dans l'affaire du meurtre d'un jeune juif, séquestré et torturé en 2006 près de Paris, réclamant un nouveau procès.

Le parquet général de Paris devrait dire d'ici au 20 juillet s'il fait ou non appel du verdict du procès du «gang des barbares» qui s'est tenu pendant deux mois et demi à huis clos.

Dès l'énoncé du verdict vendredi soir, Me Francis Szpiner, l'avocat de la famille d'Ilan Halimi, le jeune juif assassiné, avait souhaité que soit fait appel des condamnations des principaux complices, notamment des neuf ans de prison pour la jeune fille ayant servi d'appât pour le rapt.

Le Bureau national de vigilance contre l'antisémitisme (BNVCA), une organisation juive, a jugé dimanche le verdict «incomplet» et «indulgent» et réclamé l'intervention de la ministre de la Justice Michèle Alliot-Marie pour obtenir un appel.

Le BNVCA a appelé à manifester lundi devant le ministère.

S'exprimant dès la fin du shabbat samedi soir, le Conseil représentatif des Institutions Juives de France (Crif) a dit «espérer que, s'il y a appel, la législation permettra à ce nouveau procès d'être public».

«Le Crif est inquiet, comme l'est la communauté juive de France», a ajouté l'organisation, tandis que l'Union des étudiants juifs de France s'est déclarée «choquée par la nature des condamnations des membres du "gang des barbares"».

Ruth Halimi, la mère d'Ilan, a jugé de son côté «pas possible» que soit mis un point final à l'affaire. «L'antisémitisme n'est pas un fait divers (...) Mon sentiment est que la sanction n'est pas à la mesure» de la gravité des faits, affirme-t-elle sur leparisien.fr.

Les critiques visent non pas la condamnation de Youssouf Fofana, le chef autoproclamé des «barbares» qui a sans surprise écopé de la peine maximale, la prison à vie assortie de 22 ans de sûreté, mais celles infligées aux principaux complices du rapt et de la séquestration d'Ilan Halimi.

Ce vendeur de téléphones portables de 23 ans, enlevé dans le but d'obtenir une rançon -qui n'a jamais pu être versée-, avait été séquestré et torturé pendant trois semaines dans une cité de Bagneux, en banlieue parisienne. Retrouvé agonisant au bord d'une voie ferrée le 13 février, il était mort lors de son transfert à l'hôpital.

L'affaire à connotation antisémite avait ému toute la France.

Outre Fofana, qui a reconnu avoir porté seul les coups fatals, 26 personnes - dont deux n'avaient pas 18 ans à l'époque des faits - ont comparu aux assises des mineurs et les condamnations s'échelonnent de six mois de prison avec sursis jusqu'à 18 ans de réclusion, sans compter deux acquittements.

Les deux jeunes hommes considérés comme les complices les plus actifs ont écopé de 15 et 18 ans de réclusion là où l'avocat général avait réclamé 20 ans pour chacun. La jeune fille qui avait attiré Ilan Halimi dans le piège en le séduisant a été condamnée à neuf ans de prison, contre 10 à 12 ans requis.

Globalement pour la majorité des complices, les condamnations sont en deçà des peines requises, mais le plus souvent très légèrement.

Plusieurs avocats de la défense ont salué un verdict «équilibré», l'avocat général Philippe Bilger le qualifiant même d'«exemplaire» car tenant compte à la fois de la gravité des faits et des personnalités de chacun.